Analyse transversale d’une tentative de contre-hégémonie numérique
Bruno CostaLes relations internationales classiques adoptent un nouvel axe dans lequel s’inscrivent les démarches du BRICS cable. La situation actuelle mise en lumière par Edward Snowden démontre une certaine hégémonie des États-Unis et des firmes américaines sur ce capitalisme de surveillance. Cette hégémonie et les conséquences qu’elle implique pose donc la question des politiques publiques à mener pour les États afin de garantir leur contrôle du territoire de la datasphère, tout autant stratégique que peuvent l’être les territoires physiques, les domaines critiques de l’économie ou leur souveraineté. Pour comprendre ces nouvelles relations qui structurent les relations internationales il faut donc traiter du numérique dans sa globalité.
Aperçu des usages historiques et des tentatives de définitions critiques
Tobias Etienne-GreenwoodLa notion de persécution est au cœur de la définition du réfugié dans le droit international contemporain. Elle est au centre des enjeux des politiques migratoires et d’asile. L’enjeu est d’autant plus crucial que c’est un outil juridique qui peut avoir des conséquences tangibles sur l’existence de certains individus. D’emblée, il apparaît qu’une tension inhérente s’attache à cette notion car, comme toute norme juridique, la notion de persécution doit être appliquée d’une façon universelle, c’est à dire de la même façon pour tous, mais à des cas particuliers. Comme le droit d’asile, la notion de persécution s’inscrit dans une dimension dérogatoire.
Dans une première partie de cette synthèse nous reviendrons sur les origines et le déroulement de ce conflit à travers l’étude de quatre points majeurs. A savoir : la genèse du conflit ethnique entre les communautés cingalaise et tamoule à Sri Lanka, le choix des armes et l’organisation de la guérilla séparatiste tamoule, l’échec des négociations et le tsunami comme vecteur de radicalisation du conflit. Ces quatre points devant nous permettre d’expliquer pourquoi et comment cette guerre civile a pu s’étendre sur plus de 20 ans et aboutir à une guerre totale entre les deux camps.
La deuxième partie de notre travail s’intéressera plus particulièrement à la politique d’enfermement menée par le gouvernement sri lankais à l’encontre de la population tamoule. Nous tenterons ainsi de comprendre comment s’est opéré le glissement entre la politique de guerre totale et la politique d’enfermement, puis chercherons à définir la situation de ces personnes déplacées en comparaison aux définitions généralement apportées à ce type de situation. Nous décrirons ensuite les conditions de vie des populations internées dans les camps et verrons quelles furent les résistances tant internes qu’internationale vis-à-vis de la politique sri lankaise. Enfin, nous nous intéresserons aux conditions de retour de ces personnes déplacées et aux programmes concernant leur réinstallation.
Le 19 mai 2009, l’armée sri lankaise annonçait sa victoire sur les Tigres de Libération de l’Eelam tamoul (Liberation Tigers of Tamil Eelam - LTTE) . Deux jours plus tôt, les LTTE avaient déposé les armes, face à l’offensive de l’armée leurs enclaves au Nord du pays ; l’armée avait annoncé le même jour que le chef des LTTE, Velupillaï Prabhankaran, avait été tué.
Par ailleurs, au tournant des années 2010, la question de l’accueil des étrangers en France, que ce soit pour des raisons économiques ou politiques, est plus que jamais source de tensions entre les représentations humanistes de la République française d’un côté, et la progression de la xénophobie dans les discours et les actes des élus de cette République, prompts à désigner des boucs émissaires aux difficultés économiques et (géo)politiques du pays, dans un contexte de crise financière et économique.
Ce contexte politique, économique, et idéologique, à la fois au Sri Lanka et en Europe, est-il synonyme de changements dans les représentations identitaires chez la population tamoule à Paris, et plus particulièrement le milieu associatif tamoul ? A-t-il un impact sur le traitement des nouveaux arrivants de cette population par les autorités, et notamment celles en charge de l’immigration en France ?
Cette chronologie vise à périodiser les décisions européennes en matière de migration et d’asile (partie gauche du tableau) en s’appuyant sur un constant va-et-vient entre ce niveau juridique et les pratiques et déclarations des parties en présence (partie droite de ce tableau). La chronologie s’arrête le 12 mars 2011 au début des événements survenus au Maghreb. Elle sera actualisée régulièrement.
Le processus de séparation spatiale des classes sociales n’est pas un phénomène récent en France, déjà au XIXe siècle des villas se construisaient dans les bois de la périphérie parisienne, créant des espaces résidentiels exclusifs. Cela contredit en partie l’idée que l’on a des gated communities, présentées comme un phénomène essentiellement d’origine états-unienne, ce type d’habitat fait appel à des aspirations de distinction et de recherche de l’entre-soi, qui sont des traits présents dans toutes les sociétés avec une hiérarchie sociale. Ce qui est nouveau, c’est la banalisation de leur construction, elle ne n’est plus uniquement restreinte aux couches les plus riches de la société, les gated communities « se démocratisent » doucement.
Le système hukou chinois est un système d’enregistrement et de contrôle de la population. Il a été mis en place au milieu des années cinquante, il a longtemps été utilisé pour restreindre les migrations, spécialement des zones rurales vers les zones urbaines. Le système hukou détermine les opportunités des individus et sa position socio-économique dans la structure sociale. Dans l’esprit de la majorité des chinois, la localisation hukou et la classification ne définit pas seulement le bien-être général mais aussi leur statut – le hukou non-agricole est supérieur au hukou agricole ; les villes (shi) sont supérieures aux villes moyennes (zheng), et celles-ci sont supérieures aux villages (xiang). Ainsi, le hukou a crée une société duale, séparée en deux entités distinctes, les villes et les campagnes.
A travers une synthèse des différents dispositifs proposés ces trois dernières décennies, en particulier ceux ciblant les Maliens, ce travail propose de mettre en évidence les raisons qui poussent les immigrés à ne pas solliciter l’aide au retour de l’Etat français. Malgré des ajustements des programmes [I], ces derniers ne semblent toujours pas correspondre aux besoins et aux réalités vécues par les migrants [II].
Rroms, Tsiganes, Manouches, Gitans…quelque soit le nom qui leur ait attribué, ils restent un peuple méconnu et largement entaché de préjugés sans fondement. Pourtant, les Rroms forment la plus grande minorité culturelle paneuropéenne et sont parmi les plus vieux habitants de l’Europe. Les persécutions et discriminations dont ils sont victimes, de longues dates, demeurent encore très vives aujourd’hui, comme ont pu le démontrer les derniers faits d’actualités. Ces dernières années, la montée des violences à l’égard des Rroms s’est trouvée alimentée tant par les médias que par certains gouvernements. Mais les Rroms ont aussi été inscrits dans l’agenda prioritaire de l’Union Européenne (UE) qui semble sur la voie d’un processus d’intégration. Considérant l’éducation comme le levier principal d’ascension sociale et comme une façon de lever les obstacles à une cohabitation et une compréhension entre populations rroms et celles majoritaires, l’UE a choisi de mettre l’accent sur la scolarisation.
Dans le contexte de crise économique et de mondialisation sécuritaire, exacerbé par les évènements du 11 septembre 2001, deux paradigmes s’offrent à l’UE en matière de politique d’immigration : le contrôle, comme moyen de la contenir, et le développement comme moyen de la supprimer. L’Union européenne a décidé de combiner les deux en adossant à sa politique de coopération et de développement bilatérale et multilatérale des missions de réadmission des nationaux, ainsi qu’un travail de contrôle et de dissuasion des étrangers vers leur pays d’origine par les pays tiers.
S’il est à ce jour impossible d’évoquer une politique d’immigration européenne à proprement parler, (...)
La loi du 23 novembre 2003 relative à la maîtrise de l’immigration, le séjour des étrangers en France et la nationalité durcit les conditions requises pour l’hébergement des étrangers en France et l’obtention de la carte de résident. Les expulsions reprennent. Mais l’arrestation d’enfants de familles sans-papiers au sein même de leur établissement scolaire dans le courant de l’année 2005 met le feu aux poudres.La fin de l’année scolaire approchant, une deuxième circulaire est publiée le 13 juin 2006. Les dossiers de familles sans-papiers qui ont au moins un enfant scolarisé à la rentrée 2005 et qui ont déjà fait l’objet d’un refus de séjour pourront être réexaminés « à titre exceptionnel et humanitaire ». Suit l’énumération de six critères que les familles doivent remplir. A priori, rien de compliqué, mais la mise en œuvre de cette circulaire suscite rapidement de vives polémiques. Des applications très disparates de la circulaire s’observent d’une préfecture à l’autre, et parfois au sein d’une même préfecture.
Crée en 1971 à l’initiative d’un petit groupe d’intellectuels rejoints par un collectif associatif (Cimade, COJASOR …), France Terre d’Asile est une association à but non lucratif. Née pour promouvoir le droit d’asile et la défense des réfugiés, FTDA souhaite très vite ne pas rester sur un terrain théorique. Son objectif consiste à mettre en place une véritable politique d’accueil financée par l’Etat. Dans le cadre de cette note, il convient donc de s’intéresser à l’évolution du rôle de FTDA dans le DNA mais aussi dans la configuration plus générale de la politique de l’asile en France.
La Cimade Ile-de-France a pris conscience, par le biais des différentes permanences qu’elle assure, des problèmes spécifiques rencontrées par certaines femmes et de l’inadéquation des conditions d’accueil de ces femmes dans les permanences existantes. Elle a décidé de mettre en place une action « femmes » et notamment une « permanence femmes », destinée aux femmes étrangères, migrantes ou demandeuses d’asile, victimes de violences. La première permanence d’accueil s’est ouverte en décembre 2004 à Paris.
Le texte présenté ici est élaboré à partir des observations effectuées lors de trois recherches de terrains d’un mois au moins, dans les camps de réfugiés sahraouis situés au Sud-Ouest de l’Algérie. Ces campements sont installés depuis 1976, date à laquelle l’Espagne a abandonné sa colonie au Maroc. Depuis, malgré un mouvement de résistance (le Front POLISARIO), une République fondée dans l’exil (République Arabe Sahraouie Démocratique, RASD), et plusieurs résolutions de l’ONU réaffirmant le droit des peuples à disposer d’eux-même, aucun référendum d’autodétermination n’a pu être mis en place malgré la MINURSO, force des Casques bleus qui gère le territoire. On estime à 160 000 le nombre de réfugiés vivant dans a hamada de Tindouf, plateau particulièrement aride du Sahara, dans 4 camps principaux. Les conditions de vie y demeurent très précaires car le terrain ne permet pas une installation (pas de puits, impossibilité d’agriculture ou d’élevage, isolement géographique, conditions météorologiques extrêmes, etc.). Le texte suivant évoque, en particulier, la façon dont les jeunes réfugiés rencontrent le monde extérieur au cours de leur vie, et les adaptations conséquentes.
Les réfugiés palestiniens de Syrie sont quasiment tous originaires du nord de la Galilée (district de Safad, de Jaffa et de Haïfa) et ont fui la Palestine en 1948. La trajectoire de l’exil est relativement homogène : sauf de rares exceptions, les réfugiés sont partis à pied vers le Liban voisin, où ils ont été pris en charge par les Etats arabes ; la Syrie a organisé un convoiement par train des réfugiés, les répartissant dans différents sites du pays. Le camp de Neirab, ancien camp militaire à la périphérie d’Alep, est le plus éloigné de la Palestine. Les réfugiés ont été installés dans d’anciennes baraques de l’armée, qu’ils ont ensuite aménagées et transformées au fil du temps. L’UNRWA joue un rôle particulier d’agence « pour les Palestiniens », et sert en quelque sorte de garantie à leur reconnaissance internationale en tant que réfugiés.Le camp et l’UNRWA apparaissent comme deux lieux privilégiés pour étudier les processus de construction d’une identité différenciée chez les Palestiniens ; la réhabilitation du camp par l’UNRWA, un moment critique révélateur de toutes les tensions de la situation de réfugié. C’est donc en observant la mise en place du projet de réhabilitation du camp de Neirab que j’ai appréhendé les positionnements des réfugiés du camp, les renégociations de statut et de rôle.
Nous allons dans cet article analyser le discours de sept ONG. Notre choix des ONG ne s’est pas effectué selon l’origine nationale ou sur une population particulière ; les migrants clandestins en transit au Maroc, et dont l’aspiration est de venir en Europe. Nous avons pu observer des différences entre ces discours qui s’expliquent par les vocations spécifiques de chacune des ONG. Cependant des similitudes importantes au sein de ces discours préexisteraient à ces différences de fonds.
L’objet de cette étude est de dégager le profil des migrants subsahariens transitant par le Maroc qui ressort, en octobre 2005, à la lecture de la presse française, espagnole et marocaine, et de tenter d’analyser celui-ci. Les journaux étudiés sont : "Le Monde" (France), "Libération" (France), "El Mundo" (Espagne, centre droit), "El Païs" (Espagne, gauche), "La Gazette du Sahara" (Maroc), "Le Matin du Sahara" (Maroc, pro gouvernemental).
Un CADA est un centre d’hébergement spécialisé dans l’accueil des demandeurs d’asile. Depuis le décret du 3 juillet 2001, c’est juridiquement un CHRS (centre d’hébergement et de réinsertion sociale). Son fonctionnement est régi par des circulaires émanant du Ministère de l’Emploi et de la Solidarité. Il est financé par l’Etat au titre de l’aide sociale, le contrôle budgétaire est assuré par la DDASS et il est géré par une association ou une entreprise. Depuis janvier 2004, avec la disparition de l’asile territorial et la création d’une protection subsidiaire, tous les demandeurs d’asile peuvent prétendre à un accès en CADA, alors qu’autrefois, il était réservé aux seuls demandeurs d’asile conventionnel.
Les idées utilitaristes correspondent à une définition de l’immigré considéré comme objet dont la valeur serait fonction des données économiques et démographiques d’un pays ; variable permettant de réguler les besoins de main d’œuvre ou d’actifs en augmentant les entrées ou les sorties. Les idées utilitaristes ont depuis longtemps été, en Europe le fondement des politiques d’immigration. Il s’agissait de faire face à la pénurie de main d’œuvre pendant les périodes de croissance, de combler le manque de forces vives après les désastres humains des deux guerres mondiales, ou encore de peupler des terres vides. L’utilitarisme migratoire est l’étape suivante, il a une dimension cynique et hypocrite. D’un besoin économique, d’une définition politique, on passe à une doctrine idéologique qui se développe depuis les années 90 d’une façon nouvelle. Il se repère dans les discours des acteurs qui qualifient l’immigration de bonne, de mauvaise, d’utile ou d’inutile.
Le terme « violence contre les femmes » désigne tout acte de violence liée au genre (« sexo-spécifique ») entraînant des dommages corporels, sexuels ou psychologiques pour la femme, la jeune fille ou la fillette qui en est victime. Ce type de violence englobe les actes perpétrés contre une femme parce qu’elle est une femme et les actes dont les femmes sont plus fréquemment victimes que les hommes. Le droit international protège les femmes victimes de persécutions. De nombreuses associations ainsi que des lobbies se battent pour la reconnaissance des persécutions spécifiques aux femmes comme motifs d’octroi de l’asile ou pour une interprétation effective plus souple de l’article 1A2. Pendant longtemps la spécificité des violences faites aux femmes ne fut prise en compte à aucun moment dans le processus de demande d’asile en France. Les associations semblent prendre de plus en plus souvent en compte cette spécificité.