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Le programme "DISCRETS"

Présentation du programme "DISCRETS"

Titre : Discriminations : espace, travail, société (DISCRETS)

Responsable scientifique du projet : Marc BERNARDOT, PR sociologie, université du Havre, CIRTAI, TERRA

Durée : 3 ans (mai 2009 / mai 2012)

Equipe de recherche :

Afiouni N. (MCF anglais, Le Havre, GRIC)
Bernardot M., (PR sociologie, Le Havre, CIRTAI/TERRA)
De Filippis R. (MCF, sociologie, Le Havre, CIRTAI)
Galinon B. (PR, information et communication, Le Havre, CEDHET/CIRTAI)
Lagès P. (MCF économie, Le Havre, CERENE)
Le Marchand A. (MCF économie, Le Havre, CERENE)
Lemercier E. (MCF sociologie, Rouen, GRIS)
Palomarès E. (MCF sociologie, Rouen, GRIS)

Objet et objectifs :

Word - 45 ko
bibliographie de travail habitat non ordinaire
éléments de bibliographie sur l’habitat non ordinaire, l’habitat contraint, les politiques urbaines et les discriminations

L’objet consiste à approfondir l’orientation déjà marquée de l’axe 3 ‘travail, emploi, formation’ en interrogeant l’articulation entre différentes logiques de différenciation et/ou discriminatoires. La question du travail reste centrale, tout comme la formation, mais associée à d’autres dimensions des inégalités dans la vie sociale et principalement en cherchant à placer au centre de la réflexion la variable spatiale (accessibilité/accession, fixation, mobilité, circulation, logement, rapports aux et représentations des territoires).

On mettra l’accent sur le travail mobile et les catégories concernées (gens du voyage, migrants, plasticiens, ouvriers de chantiers, étudiants…) en étudiant particulièrement, les conséquences en matière d’insertion professionnelle, de structuration du marché du travail et de l’habitat. On étudiera aussi les différents processus de recrutement, d’orientation ou d’accompagnement dans le monde de la formation, du travail et du logement en fonction du secteur professionnel, du genre, du handicap, de « l’origine », de l’âge, etc.

On interrogera enfin les discours et les représentations (notions de diversité, de pluralité, de mixité, etc.), les politiques et les réseaux (action publique et privée, partenariats, chartes) en lien avec les discriminations et les inégalités d’accès aux ressources en étudiant en particulier le cas de la gestion des situations de surpeuplement, les dispositifs législatifs en matière de droit au logement, d’habitats non ordinaires et d’urgence, mais aussi dans les thématiques évoquées plus haut (processus d’embauche, de conventionnement professionnel, d’orientation, etc.). Le projet est ambitieux à plus d’un titre.

- Une ambition théorique et conceptuelle tout d’abord en raison de la volonté d’ajouter la question de l’espace à la problématique de l’intersectionnalité genre, classe, ‘race’.

- Une ambition pluridisciplinaire ensuite incarnée par la diversité des chercheuses et chercheurs en sciences sociales mobilisés (sociologie, économie, histoire, gestion, sciences de l’information et de la communication, lettres…), des structures engagées (plusieurs laboratoires du Havre et de Rouen, des réseaux scientifiques, des partenaires institutionnels et/ou économiques potentiels nombreux) et des publics concernés.

- Une ambition concrète enfin, matérialisée premièrement par le caractère empirique des travaux prévus (enquêtes de terrain dans la région normande, comparatisme avec d’autres situations régionales ou nationales), deuxièmement par l’expérience de l’équipe sur le domaine (travaux pour partie déjà engagés), troisièmement par les possibilités existantes de publication et de valorisation à l’échelle académique (séminaire, journée d’étude, colloque, numéro de revues, ouvrage collectif) et au niveau local, régional et international.

Quel est l’impact attendu du projet en terme de développement du GRR ? Les travaux de l’axe 3 Travail, emploi, formation traitait jusqu’à présent de la « différenciation sociale et sexuée des parcours professionnels ». Le projet est ici d’associer à la problématique désormais classique de « l’intersectionnalité » : Genre, Classe, ‘Race’, la dimension spatiale. Cette nouvelle étape de structuration de l’axe 3 vise à compléter l’approche en articulant désormais les trois premières thématiques avec les discriminations dans les domaines du logement, de l’habitat et de l’inscription spatiale des agents concernés.

Quel est l’impact attendu du projet en terme de développement du(des) laboratoire(s)/équipe(s) concernées ? Ce projet est pensé en lien avec d’une part un séminaire de sociologie du CIRTAI au Havre accueillant diverses approches disciplinaire et qui propose plusieurs séances consacrées à l’analyse combinée des habitats non ordinaires d’autre part le lancement du parcours professionnel de Master « Métiers et services de la ville de l’habitat » au sein de l’UFR SHS de l’université du Havre. Quel sera l’impact du projet en terme de visibilité à l’échelle nationale, européenne, voire internationale ? Le caractère multifocal et pluridisciplinaire du projet lui donne une dimension structurante avec des recherches pouvant s’engager pour plusieurs années. Les possibilités de partenariats avec les acteurs régionaux (Etat, collectivités, monde économique et éducatif) ainsi qu’avec des partenaires scientifiques (réseau TERRA notamment) offrent des perspectives en matière de valorisation et de publications.

Les résultats issus de ce projet seront-ils valorisés à l’échelle du territoire régional ? L’essentiel des terrains d’enquêtes concerne directement le bassin normand tout en développant des perspectives comparatives (France/ Grande Bretagne notamment). La question des discriminations dans les domaines articulés du travail, de la formation et du logement préoccupe les acteurs publics et privés au niveau local comme national.

Problématique

L’objectif général est d’interroger l’articulation entre différentes logiques de différentiation et de discrimination en associant notamment la dimension travail avec la variable spatiale. On cherchera d’abord à étudier des interactions entre la question du travail, en particulier mobile, et les formes d’habitats, en particulier non ordinaire.

1. Le travail mobile et l’habitat non ordinaire

Cette double question du travail et de l’habitat en situation de mobilité est abordée de deux manières. Tout d’abord on s’interroge sur le retour au premier plan des formes de logement mobiles. Comment les mutations actuelles du travail influent sur les conventions et les usages du logement et expliquent le développement du "logement non ordinaire" ( bi-résidentialité, habitat mobile, hôtels, foyers, campings, squats) ? En quoi ces pratiques génèrent de nouvelles inégalités ou s’articulent avec d’anciennes. Comment ces phénomènes interagissent avec des éléments culturels pour expliquer des discriminations, comme celles à l’encontre des gens du voyage, et en génèrent d’autres.

L’autre axe porte sur les politiques publiques et sur le rapport des acteurs publics et économiques avec ces territoires ségrégués et des formes d’habitats non ordinaires et de logement contraint (Bernardot 2006). Comment s’établit le contrôle de ces territoires dans un temps post-fordiste (Lipietz Leborgne 1989) ? On proposera d’étudier les différentes stratégies d’intervention des pouvoirs publics dans des cas de résorption d’habitat clandestins ou insalubres (Tlemçani, Missamou 2000) ou encore dans le cas de l’établissement et de la gestion de logement temporaires suite à des catastrophes naturelles (Nigg et al 2006). On veillera à un double comparativisme avec les expériences du passé colonial ou non (Bouche 1968) et avec différents types d’interventions contemporaines de réinstallation, de sédentarisation ou de déterritorialisation (Simon 2001, 2003).

2. Orientation, recrutement, accompagnement : dans l’emploi et dans la ville

Le deuxième point structurant de ce programme porte sur les questions d’accès à et d’orientation dans l’emploi et la ville. Cet aspect est abordé à partir de plusieurs enquêtes de terrain. L’équipe traite ainsi de plusieurs cas de figures mettant en évidence et se plaçant à l’intersection de plusieurs éléments et catégories de différenciation (espace, classe, genre, ‘race’).

Une première série de démarches porte sur le monde de l’emploi et de l’orientation. Une première enquête est prévue sur les acteurs de l’orientation sociale et professionnelle, en faisant porter tout particulièrement l’attention sur le traitement de la différence de genre. Une deuxième enquête, à visée plus quantitative et se basant sur des séries de questionnaires s’interroge sur la mobilité dans les projets professionnels ou non des étudiants et s’intéresse aux dispositifs d’accompagnement et aux facteurs déterminants de l’orientation. Enfin une étude qualitative sur les cabinets de recrutement pose la question de l’évaluation dans les entreprises normandes des mesures d’accompagnement à l’insertion ayant bénéficié à des personnes victimes de discriminations.

L’aspect politique et urbain est traité par une enquête qui se propose d’étudier l’application concrète du droit au logement. Il s’agit d’une recherche empirique sur la mise en oeuvre de la loi du 5 mars 2007 sur le "droit au logement opposable". L’objectif est d’étudier les conditions concrètes d’application du texte, en prenant comme exemple le département de la Seine Saint-Denis et d’étendre les investigations à l’examen des dossiers individuels, de s’interroger sur les conditions de déroulement des travaux de la Commission de médiation, de connaître la procédure qu’elle a suivie, des suites qui ont été réservées à l’examen des dossiers dont elle a été saisie.

3. Discours, politiques et réseaux

La troisième dimension de ce programme porte d’une part sur les discours et les politiques publiques en matière de diversité, de discrimination et de gestion des migrations et d’autre part sur les apports théoriques de l’économie des conventions à la question de l’évaluation et de la différentiation.

Une première enquête s’attachera à mettre en évidence les différents discours politiques sur la pluralité dans le monde éducatif (analyse de l’éducation multiculturelle) en Grande-Bretagne à des fins de comparaison avec la situation française. Les autres travaux prévus dans le cadre de ce troisième point s’intéressent plus directement à la question spatiale et aux effets discursifs du traitement des inégalités et des discriminations. Cette question est explorée de plusieurs manières. Une recherche se penche sur les conditions d’inhumation des étrangers et des musulmans. Une deuxième recherche aborde la gestion du surpeuplement des logements par l’action publique et l’établissement de parcours de relogement dans les opérations de renouvellement urbain. Elle vise à comparer les modes de catégorisation et de prise en charge des familles résidant dans des logements « suroccupés ». Son originalité réside dans la saisie de l’action publique à partir des parcours résidentiels et du vécu des discriminations. La perception et la participation des populations seront traitées dans les différentes enquêtes mais particulièrement dans l’un d’entre elles qui abordera la question de la mémoire individuelle et familiale des discriminations dans une perspective d’histoire orale. Et dans une perspective sociohistorique identique sera étudié l’histoire des institutions spécialisées dans la gestion des migrations en particulier la direction de la population et des migrations (DPM).

Sont aussi explorées dans cet axe les possibilités théoriques et modélisatrices de l’économie des conventions à la question des discriminations. L’économie traditionnelle ne considère le marché que comme cadre de coordination des agents et dès lors le prix apparaît comme l’ultime évaluation des biens et des personnes. L’économie des Conventions (Revue Française d’Economie 1989 : Favereau, Eymard-Duvernay, Salais, Dupuy, Thévenot, Orléan) reconnaît une pluralité d’institutions basées sur des valeurs concurrentes, autrement dit des principes d’évaluation différents. En considérant que les institutions sont des constructions sociales, l’économie des conventions adopte une démarche plus large et mobilise l’apport de la sociologie (notamment Desrosières et Thévenot, Boltanski et Thévenot 1991, Boltanski et Chiapello 1999) afin de comprendre et d’expliciter la manière dont sont qualifiés les biens et les personnes. Nous inscrivons nos travaux dans ce courant de recherche et proposons d’utiliser cet appareil théorique sur le marché du travail, multipliant les terrains (enquête sur l’insertion professionnelle en Haute-Normandie, enquête sur le marché du travail des artistes plasticiens, enquête sur les travailleurs mobiles).

Méthodologie

Les chercheurs qui composent l’équipe du programme DISCRETS sont issus de différentes disciplines des sciences humaines et sociales. Les premiers séminaires internes du programme seront en partie consacrés à des échanges sur la question des méthodes et de choix des variables et indicateurs utilisés. Les techniques sont variées et adaptées aux différents terrains à explorer, les focales sont multiples (ménages, quartiers, réseaux professionnels, cas institutionnels spécifiques, groupes sociaux). Les terrains et les sources seront développés essentiellement dans la région normande. [vallée de la Seine et communes rouennaises et havraises (Rouen, Le Havre, St Etienne du Rouvray, Cléon, Evreux, Les Andelys…)].

Pour l’essentiel les techniques d’enquête et de recueil de données seront qualitatives. Pour mémoire nous pouvons mentionner :
- une centaine (100) d’entretiens répartis sur les différents thèmes et sites étudiés.
- Des entretiens semi directifs, des récits de vie, (mémoire orale, reconstitution de trajectoires résidentielles, professionnelles et de carrières institutionnelles)
- des observations participantes
- des analyses de cas (DRH d’entreprises et d’institutions normandes, commissions de médiation de la loi DALO), des analyses institutionnelles pour l’ex Direction de la population et des migrations).
- des examens de dossiers individuels (surpopulation et loi DALO)
- des monographies de quartier des communes de la région
- des compléments quantitatifs (enquête sur des promotions d’étudiants havrais par questionnaire)

éléments de bibliographie sur l’habitat non ordinaire, l’habitat contraint, les politiques urbaines et les discriminations

interventions des chercheurs du programme