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Esquisses

Recueil Alexandries

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janvier 2006

Cécile Dubernet

Quand l’espace humanitaire devient une zone de guerre : personnes déplacées et peurs sécuritaires

auteur

Docteur en Science Politique de la Bristol University (UK).

résumé

Cet article remet en question les politiques de « protection internationale » pour personnes déplacées développées depuis la fin de la guerre froide. Il suggère que cette protection est conçue pour contenir des populations en fuite au sein de pays ravagés par la guerre. Cette « protection » peut donc coexister avec certaines formes de violence envers les déplacés. Malgré cela, la rhétorique humanitaire des Nations unies reste centrée sur les besoins des déplacés. L’impact des objectifs migratoires de ces politiques humanitaires demeure donc inexploré. De plus, les discours sur la vulnérabilité des déplacés cachent le fait que la communauté internationale cherche à se protéger d’exodes chaotiques. Néanmoins, rejeter le concept de protection internationale comme étant hypocrite n’aide ni à l’analyse, ni à la réforme. En revanche, explorer l’interface entre l’humanitaire et le sécuritaire peut aider à comprendre comment certains espaces se transforment en pièges et, peut-être, comment éviter d’en arriver là. Une telle optique requiert, entre autres, de mettre l’accent sur les zones frontalières et leurs dysfonctionnements. Il n’est pas surprenant que certaines d’entres elles soient déjà l’objet de beaucoup d’attention internationale. D’après Cynthia Enloe, l’écrivain féministe, pour comprendre les institutions il faut se pencher sur ce dont elles ont peur. Dans cet article, l’auteur espère avoir identifié certaines peurs à la source de l’ingérence humanitaire actuelle ainsi que d’avoir illustré certains de leur impact.

à propos

Cet article sera publié en version définitive par les Les Annales de l’Université de Toulouse, en 2006, dans le cadre d’un dossier dirigé par Jean-Michel MARTIN qui dirige également la préparation d’un ouvrage collective sur ce thème. Cet article remet en question les politiques de « protection internationale » pour personnes déplacées développées depuis la fin de la guerre froide. Il suggère que cette protection est conçue pour contenir des populations en fuite au sein de pays ravagés par la guerre. Cette « protection » peut donc coexister avec certaines formes de violence envers les déplacés.

citation

Cécile Dubernet, "Quand l’espace humanitaire devient une zone de guerre : personnes déplacées et peurs sécuritaires", Recueil Alexandries, Collections Esquisses, janvier 2006, url de référence: http://www.reseau-terra.eu/article346.html

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Les migrations forcées ont fait partie intégrante de l’émergence de l’État-nation. Elles accompagnèrent aussi bien les guerres civiles et les luttes anti-coloniales, que des phases plus tranquilles de la construction étatique. Aujourd’hui, évictions, nettoyages ethniques, regroupements forcés sont des politiques régulièrement employées par des gouvernements dictatoriaux désireux d’éliminer une opposition ou de mettre la main sur des terres et des ressources. Cependant, jusqu’aux années 1990, le problème des déplacements forcés ne relevait pas de l’action internationale. Restant dans leurs pays, les déplacés internes ne pouvaient bénéficier de la protection offerte par la Convention sur les réfugiés de 1951. D’autre part, les règles de la guerre froide et la primauté donnée à la souveraineté de l’État sur son territoire limitaient sévèrement l’utilisation d’autres instruments de protection des civils tels que la Convention des droits de l’homme, la Convention contre le génocide ou même le droit humanitaire international.

Depuis quinze ans néanmoins, les Nations unies et les pays occidentaux sont intervenus dans des conflits au nom de la protection des civils déplacés, par exemple au Kurdistan irakien, en Bosnie-Herzégovine, au Rwanda, à Haïti, au Kosovo ou au Timor-Oriental. Parallèlement à ces opérations de premier plan, un travail légal a été effectué au sein de l’Organisation des Nations unies, culminant en 1998 par la publication des principes directeurs relatifs au déplacement de personnes à l’intérieur de leur propre pays. Ce document définit les personnes déplacées de la façon suivante : « Les personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays sont des personnes ou des groupes de personnes qui ont été forcés ou contraints à fuir ou à quitter leur foyer ou leur lieu de résidence habituel, notamment en raison d’un conflit armé, de situations de violence généralisée, de violations des droits de l’homme ou de catastrophes naturelles ou provoquées par l’homme ou pour en éviter les effets, et qui n’ont pas franchi les frontières internationalement reconnues d’un État [1]. »

Cependant et malgré ces efforts, la situation des personnes déplacées reste désespérée. Leurs habitats détruits, elles demeurent extrêmement vulnérables et sont rarement bien accueillies par des hôtes souffrant eux-mêmes des conditions de la guerre ou du mal-développement [2]. De plus, les attaques brutales sur des espaces humanitaires tels que Srebrenica en Bosnie ou Kibeho au Rwanda ont montré qu’une présence internationale n’est pas synonyme de protection. Et, c’est précisément lorsque l’espace humanitaire se transforme en zone de guerre, qu’il est assiégé, bombardé et dirigé par des chefs de gangs que des questions sur la nature de l’ingérence occidentale s’imposent.

Cet article explore les liens ambigus entre la volonté de protéger des civils et celle de les contenir dans les frontières de leurs pays en guerre. L’on va tout d’abord montrer que la protection internationale déployée pour les personnes déplacées depuis la fin de la guerre froide est un outil de gestion des flux migratoires. Son objet principal reste de limiter l’exode, de retenir des civils en fuite dans leur pays d’origine. Une deuxième série de réflexions sera consacrée à la description de quelques conséquences de cette politique, avant, dans un dernier point, de montrer que la plupart des analyses actuelles à propos des interventions humanitaires ignorent que la protection des victimes est un moyen, non une fin. L’on suggérera en guise de conclusion quelques axes de recherche permettant d’explorer de façon critique mais constructive l’engagement humanitaire.

L’assistance in situ : instrument privilégié de prévention des exodes.

Les expressions « populations en danger », « crise humanitaire », « génocide », suggèrent une catastrophe imminente appelant une action immédiate. L’impératif d’être rapide face au danger pour soulager des souffrances humaines, rend presque indécente la critique de ces choix politiques, quand, enfin, ils sont effectués en diplomatie internationale. Il faut agir au Darfour, sauver des vies, peu importe si les victimes sont protégées parce qu’elles sont humaines ou que ce soit afin d’éviter leur fuite au Tchad, leur dispersion vers le sud, et prévenir leurs mouvements incontrôlables. Pourtant, il importe de savoir quel péril l’on cherche à éviter. En effet, un danger peut en cacher un autre et une solution aussi. Pour cela, il est nécessaire d’examiner le détail de l’apparition des déclarations et des politiques en faveur des déplacés. Les premières interventions des années 1990, qui furent déterminantes pour comprendre l’action humanitaire internationale, seront d’abord examinées.

L’abus des droits de l’homme et le déplacement forcé de populations, bien que souvent dénoncés, sont rarement la priorité des puissances siégeant au Conseil de sécurité des Nations unies. Aujourd’hui, on estime à environ 25 millions le nombre de déplacés, bien plus que celui des réfugiés officiels [3]. Les situations au Darfour ou en République démocratique du Congo (RDC) ont illustré récemment que l’extrême vulnérabilité des civils ne déclenche pas automatiquement une intervention en leur faveur. Il est utile de rappeler que ce fut aussi le cas lors des premières années de l’après-guerre froide. En Irak, le gouvernement de Saddam Hussein avait été armé et aidé en particulier par les États-Unis et le Royaume-Uni tout au long des années 1980, malgré plusieurs rapports crédibles sur le déplacement systématique de certaines minorités comme les Kurdes du Nord [4]. Même la répression brutale des révoltes chiites et kurdes en mars 1991 n’a pas, au départ, provoqué de réaction en faveur de civils menacés [5]. En Bosnie, les épisodes de nettoyage ethnique les plus violents (exception faite de celui de Srebrenica, discuté ci-dessous) se sont produits entre avril et juillet 1992. Malgré l’expérience de la guerre en Croatie et donc le stationnement de casques bleus à Sarajevo, malgré de nombreuses informations sur les abus des paramilitaires serbes, malgré les appels du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) et du Haut-commissariat aux réfugiés (HCR), le Conseil de sécurité n’a point agi [6]. Seules quelques condamnations de principe, un embargo sur les armes et des sanctions, accompagnèrent le retrait des casques bleus postés à Sarajevo. De même, au Rwanda, les membres du Conseil de sécurité ignorèrent les avertissements concernant la préparation d’un génocide. Lorsque les massacres commencèrent, en avril 1994, le nombre de casques bleu postés à Kigali fut réduit sensiblement et leur mandat changé. Il ne fut plus question de « protection » mais de « négociations » [7]. Enfin, en 1998, la première année de conflit ouvert au Kosovo, les chefs de gouvernement occidentaux espèraient encore négocier avec le gouvernement de Belgrade. De fait, jusqu’à mars 1999, les déplacés albanais ont été encouragés à retourner dans leurs villages détruits ou, au moins, à rester dans leur pays. En mars 1999, l’entrée en guerre de l’OTAN provoqua le retrait brutal des observateurs de l’OSCE dont la mission était de surveiller le cessez-le-feu conclu en octobre 1998 et de rassurer la population civile. Par voie de conséquence, plusieurs centaines de milliers de déplacés internes furent abandonnés [8].

En conclusion, il est à noter que même dans les cas d’interventions humanitaires les plus connues des années 1990, la violence initiale contre les civils ne suscita qu’une réaction internationale attentiste, voire indifférente. Lorsqu’enfin certaines de ces populations furent déclarées en grand danger, force est de reconnaitre qu’il ne s’agissait pas toujours de celles qui étaient les plus vulnérables. Par exemple, au printemps 1991, les Chiites du sud de l’Irak étaient plus particulièrement visés par les représailles des gardes républicains de Saddam Hussein. Les exactions terribles ne provoquèrent que quelques déclarations de principe, sans comparaison possible avec les efforts humanitaires déployés dans le nord du pays pour protéger les populations kurdes. En juin 1994, les militaires français de l’Opération turquoise agirent rapidement pour « protéger » les populations hutu fuyant l’avancée du Front patriotique rwandais. Ces personnes n’étaient pas les victimes du génocide mais, au contraire, celles qui abritaient les coupables. Les déclarations sur le « danger » et la nécéssité d’une « protection » relèvent donc d’un discours dont la relation au terrain est parfois ambiguë. Il est donc nécessaire d’examiner plus en détail les contextes dans lesquels ces politiques de protection émergent pour en comprendre la nature et les objectifs.

Dans trois des cas mentionnés, la situation des déplacés devient objet de l’attention diplomatique lorsqu’un exode de réfugiés conduit les pays frontaliers à fermer leurs frontières. En avril 1991, la Turquie força des centaines de milliers de déplacés kurdes à camper sur des sommets hostiles et enneigés. De même, en juillet 1992, la Croatie ferma ses frontières aux réfugiés Bosniaques, suscitant ainsi un débat sur le sujet en Europe [9]. Au Rwanda, une première vague de réfugiés atteignit la Tanzanie fin avril 1994. Dès mai, le Secrétaire général des Nations unies avertit le Conseil de sécurité que d’autres mouvements, cette fois en direction de la RDC, allaient se développer et risquaient de déstabiliser la région [10]. Les personnes déplacées furent déclarées « en danger » lorsque leur fuite menaçaient le respect des frontières, lorsque que leur exode imminent dérangeait l’ordre international. Alors que les requêtes répétées du CICR, du HCR, les nombreux rapports d’ONG sur les abus des droits de l’homme restaient sans réponse, la crainte de flux incontrôlables de réfugiés donna lieu au discours sur la vulnérabilité des déplacés et sur leur besoins de protection.

De plus, il est important de remarquer que les gouvernements et les institutions qui ont attiré l’attention sur ces mouvements de populations insistaient sur la nécessité d’éviter un exode massif [11]. Par exemple, le Premier ministre britannique, John Major, décrivait l’espace humanitaire irakien comme une halte sur le chemin du retour. Les déplacés kurdes étaient sensés descendre des montagnes vers les camps de la zone humanitaire avant de retourner vers les villes qu’ils avaient fuies [12]. Lors d’une importante conférence sur le conflit en Yougoslavie en juillet 1992, Linda Chalker, parlant au nom de l’Union européenne, déclara : « Nous pensons que le meilleur moyen de limiter le problème migratoire est d’essayer d’enrayer l’exode des personnes déplacées en fournissant une assistance suffisante permettant de les secourir dans les territoires de l’ex-Yougoslavie [13]. »

Ici l’assistance humanitaire est clairement construite comme instrument de politiques migratoires. De même, à l’automne 1992, l’idée de zones humanitaires sûres en Bosnie avait été évoquée comme solution possible pour les prisonniers bosniaques libérés des camps serbes mais pour qui le CICR ne trouvait pas de pays d’accueil [14]. Quelques mois plus tard, au printemps 1993, l’offensive serbe en Bosnie orientale plaça la communauté internationale devant un nouveau dilemme : assiégée, la ville de Srebrenica ne pouvait plus résister. Il fallait soit intervenir, soit accepter son évacuation totale et abandonner ainsi les efforts diplomatiques de Vance et Owen. Srebrenica fût alors déclarée « zone humanitaire sûre ». Il est donc clair qu’en 1991 et 1992, promettre une assistance et une protection humanitaire in situ avait pour objectif précis de limiter l’exode ou l’évacuation de civils. Le président George Bush parlant des déplacés kurdes déclara : « Comment convaincre ces personnes terrorisées de descendre [des montagnes], il faut leur parler de sécurité [15]. »

L’accent est sur « comment ». « Parler de sécurité » est un moyen. Offrir de nouvelles formes de sécurité dans des pays déchirés par la guerre fut donc la réponse imaginée par les pays occidentaux à des impasses diplomatiques telles que la fermeture des frontières turques, le nettoyage ethnique en Bosnie ou les exodes de masse du Rwanda. Dans chacune de ces situations, la protection internationale fut offerte en remplacement d’une hospitalité inexistante. Elle était conçue, avant tout, comme une stratégie par laquelle on pensait que limiter les souffrances conduirait, presque automatiquement, à limiter l’exode. Cette approche où l’humanitaire est au service d’objectifs de sécurité et de stabilité eu cependant sur le terrain des conséquences imprévues, parfois dramatique.

Des zones peu sÛres et sans issue de secours

La première conséquence d’un humanitarisme d’ordre sécuritaire est le fait que la protection internationale n’est plus celle des personnes mais bien celle des espaces, des zones tampons, des frontières menacées. Les mots le disent : espaces humanitaires, zones de sécurité, routes sécurisées ou encore zones d’exclusion aérienne, mettant ainsi l’accent sur les territoires où le niveau de danger doit être réduit ou contrôlé. La FORPRONU - Force de protection des Nations unies - fut initialement créée pour maintenir l’ordre dans certains secteurs de Croatie orientale. En 1991 en Irak, l’espace humanitaire et la zone d’exclusion aérienne ne couvraient qu’une partie du Kurdistan, laissant sans protection plusieurs villes importantes. Cet espace, s’il ne protégeait que peu les civils, formait une zone tampon très efficace le long de la frontière turque. De fait, dans les années qui suivirent sa mise en place, cet espace dit humanitaire protégea maintes fois la Turquie, en limitant les exodes résultant de conflits locaux et d’incursions militaires du gouvernement irakien ou de l’armée turque elle-même. Pendant le génocide Rwandais, les membres du Conseil de sécurité discutèrent longuement de la géographie des zones de sécurité, c’est-à-dire des meilleurs endroits pour les placer. Boutros Boutros-Ghali, alors Secrétaire général, suggéra que la capitale du pays, Kigali, située au centre du pays, soit sécurisée afin d’attirer les populations en cours de déplacement et de les éloigner des frontières du pays [16]. D’autres membres du conseil voulaient au contraire établir des zones tampons le long des frontières [17]. Lorsqu’en juillet 1994, l’armée française instaura la Zone turquoise, celle-ci fût établie officiellement pour éviter un exode massif vers Bukavu en RDC. Il est donc à noter qu’au Rwanda, comme en Irak ou en Bosnie, les zones de sécurité furent aussi bien définies qu’établies en fonction de leur importance stratégique. L’importance des discussions d’ordre géopolitique contraste avec l’absence de débat sur ce que la protection des personnes impliquait. D’où le fait que les routes et les convois tendaient à être mieux protégés que les victimes des conflits, une dérive des principes humanitaires souvent dénoncée par des ONG [18].

Un deuxième aspect à propos de ces zones protégées en est l’absence de liberté de circulation. Le gouvernement turc avait provoqué une catastrophe humanitaire en fermant ses frontières aux réfugiés kurdes. Ce même gouvernement milita activement pour obtenir une zone humanitaire en Irak en faveur des déplacés auxquels il venait de refuser l’asile. Mais, officiellement, les frontières turques restèrent verrouillées. En Bosnie, une fois Srebrenica déclarée zone de sécurité, toutes les évacuations s’arrêtèrent malgré le fait que la petite ville regorgeait de réfugiés des villages voisins. Elle devint un vaste camp assiégé, entièrement dépendant de l’aide internationale [19]. Des corridors humanitaires, comme celui organisé pour Sarajevo, n’avaient pour but que la livraison de vivres et excluaient sciemment les évacuations, sauf dans quelques cas médicaux. En résumé, la création de zones de sécurité permit le regroupement de civils et limita leurs chances de quitter des zones de guerre, que ce soit en cherchant asile à l’étranger ou refuge ailleurs dans leur pays. La façon dont les gouvernements occidentaux insistaient sur le « droit de rester », et s’opposaient au nettoyage ethnique, ne doit pas cacher le fait que les déplacés n’avaient pas le choix mais devaient demeurer sur place, et ce dans un environnement très dangereux.

En effet, une troisième caractéristique dérangeante complète les deux premières. Le but de l’action internationale étant d’enrayer l’exode, le contrôle des mouvements de population a priorité sur la sécurité des personnes. Plus d’une fois les soldats des Nations unies ont été amenés à coopérer avec les dirigeants de ces populations quelle que soit leur attitude en matière de respect des droits de l’homme. De fait, des militaires, paramilitaires, trafiquants, chefs de gang et de guerre ont ainsi vu leur pouvoir et leur emprise accrus et légitimés de par leur statut d’intermédiaires entre civils, casques bleus et ONG humanitaires. Extrême fut la situation rwandaise en 1994-1995, puisque ce furent les Interahamwe (milices responsables de l’organisation du génocide) qui dirigeaient les camps grâce à leur organisation et leur contrôle sur les populations terrorisées [20]. Mais dans tous les cas étudiés, la violence exercée par les dirigeants sur leurs ressortissants était largement ignorée par les forces internationales présentes [21].

Par conséquent, les zones de sécurité se transformèrent rapidement en centres de contrebande, de crimes et de persécution des rares personnes qui osaient prononcer une opinion contraire. Cette violence intérieure était aggravée par des attaques extérieures. L’armée turque envoya plusieurs fois ses troupes dans la zone humanitaire du nord de l’Irak, sans que ses partenaires de l’OTAN ne protestent. Les zones de sécurité bosniaques endurèrent des bombardements quotidiens entre 1993 et 1995. Enfin, les attaques du camp de Kibeho au Rwanda au printemps 1995 et Srebrenica en Bosnie, quelques mois plus tard, n’ont pas été repoussées par les casques bleus en poste sur place. Dans les deux cas, plusieurs milliers de civils périrent. La commission indépendante internationale créée pour examiner le massacre de Kibeho a mis l’accent sur des déficiences techniques, (entraînement, communication, équipement) et partagea ses critiques entre le Front patriotique rwandais, les soldats des Nations unies, les ONG et les déplacés eux-mêmes [22]. À Srebrenica, plusieurs milliers Bosniaques, hommes, furent séparés de leurs familles dans l’enceinte de la base de Potocari de la FORPRONU, avant d’être exécutés. Pourtant, seul Tadeusz Mazowiecki, le représentant de l’ONU pour les droits de l’homme en Bosnie démissionna après ce massacre. Il est important de noter qu’en 1995, le camp de Kibeho ainsi que la ville de Srebrenica posaient de gros problèmes diplomatiques. En 1995, toutes les parties engagées dans la guerre bosniaque étaient prêtes à faire des échanges de territoires, en particulier des zones de sécurité, pour concrétiser un accord politique de paix. Quant à Kibeho, il faut rappeler que depuis l’automne 1994, les Nations unies essayaient, sans succès, de fermer tous les camps de déplacés du Rwanda [23]. Il faut donc reconnaître que les violentes attaques et les disparitions de Srebrenica et Kibeho ont résolu deux sérieuses impasses diplomatiques. Cela explique-t-il le manque de réaction des casques bleus ainsi que la faiblesse des condamnations qui suivirent ces attaques ? Bien qu’intéressante, cette question n’est pas l’objet de notre propos ici.

Enfin, un dernier point est à noter : la transformation, dans ces zones, de l’assistance humanitaire en instrument de politiques migratoires. Par exemple, les distributions d’aide tendaient à être plus généreuses dans les régions et les villes où la communauté internationale voulait voir s’installer les déplacés. A contrario, le flux de l’aide pouvait être modifié, re-dirigé, voire supprimé, pour contraindre les populations à se déplacer ou a revenir chez elles. En juin 1991, au nord de l’Irak, un grand convoi d’aide fut envoyé à Dohuk, hors de la zone de sécurité, pour encourager les réfugies à y retourner [24]. En août 1994, afin d’empêcher un exode imminent vers le sud-Kivu en RDC, les Nations unies organisèrent une vaste opération humanitaire pour maintenir des populations en fuite dans à l’intérieur du Rwanda. Les distributions d’aide restaient délibérément derrière le train migratoire pour en ralentir le mouvement. En parallèle, de nouveaux camps furent ouverts près des frontières congolaises pour rassurer les déplacés. Plusieurs centaines de milliers de Rwandais ont donc été stabilisés par une utilisation stratégique de l’assistance humanitaire dont ils dépendaient pour survivre [25]. Lorsqu’en septembre 1994 il fut décidé que ces déplacés devaient retourner chez eux, un système d’encouragement au retour fut mis en place (transport, kit de reconstruction, etc.), en même temps qu’un système de sanctions quand l’incitation au retour n’avait pas les résultats escomptés. Pour disperser les camps, il fut ainsi décidé que le flux d’aide s’arrêterait en mars et avril 1995, y compris les livraisons d’eau. La décision des Nations unies de couper tout vivre à des personnes qui en dépendaient entièrement, ne laisse aucun doute sur la collusion, dans ce cas, entre logistique humanitaire et un système de contrôle des personnes déplacées.

De nombreux analystes se sont penchés sur les carences de la protection des victimes de guerre. Cet article ne prétend pas traiter l’ensemble des problèmes de l’action humanitaire. Son objet est plutôt d’attirer l’attention sur un aspect peu connu de la création de ces zones pour personnes déplacées : leur fonction stratégique de maintien des populations dans leurs pays d’origine. Les paragraphes ci-dessus illustrent donc le fait que l’insuffisance de la protection humanitaire ne relève pas uniquement de la responsabilité des chefs de guerre locaux. Les objectifs de stabilisation des migrants modifient aussi l’engagement humanitaire. Étant un outil stratégique plutôt qu’une fin en soi, la « protection internationale » est susceptible de conduire à des actions fondamentalement contraires aux règles humanitaires de base et au respect des déplacés.

En février 1998, les principes directeurs des Nations unies sur le déplacement interne furent publiés. Bien que n’ayant pas la valeur d’une convention ratifiée, ces principes ont pour but d’encourager les États, les forces militaires et autres intervenants (ONG, forces d’interposition, etc.) à respecter des règles humanitaires harmonisées [26]. L’impact de ce document, largement distribué et commenté, n’est pourtant pas encore évident. Jusqu’à présent, il n’a été créé aucune organisation spécifiquement chargée du déplacement interne. Cette mission n’a pas non plus été attribuée à une organisation existante. Par conséquent, le problème du déplacement relève de la coopération entre les différentes agences des Nations unies.

La guerre du Kosovo fut un baptême du feu pour ce nouveau guide. En 1998 et début 1999, les mécanismes de protection ne furent pas appliqués. Les souffrances des personnes déplacées furent minimisées tant que la communauté internationale cherchait une solution négociée avec le gouvernement de Slobodan Milosevic. Après l’entrée en guerre, la persécution des déplacés fut largement rendue publique, notamment durant les conférences de presse quotidiennes de l’OTAN. Cependant, le retrait du terrain des observateurs de l’OSCE et de toute les agences humanitaires ne permettait pas de protéger les civils des exactions paramilitaires. Cette guerre fut un véritable désastre, non seulement pour les réfugiés qui atteignirent l’Albanie et la Macédoine, mais aussi pour des centaines de milliers de personnes qui ne franchirent jamais les frontières. D’autre part, la partialité des forces internationales envers l’Armée de libération du Kosovo limita le respect des civils, surtout serbes. La victoire des alliés fut entachée de vagues de nettoyage ethnique de civils serbes par des paramilitaires albanais. En résumé, la guerre du Kosovo a montré les limites du système de protection des déplacés mis en place par les Nations unies. Depuis, malheureusement, les évènements dans la partie orientale de la RDC ou au Darfour, montrent que l’approche des Nations unies vis-à-vis des personnes déplacées n’a pas fondamentalement changé. L’immobilisme règne tant que les flux de réfugiés ne sont pas visibles, la priorité est donnée à la coopération avec gouvernements et militaires, alors que ces derniers sont souvent impliqués dans des abus. Une réflexion critique s’impose. Mais tant que les discours des Nations unies invoquent uniquement la vulnérabilité des déplacés comme raison d’agir, il est clair que l’impact d’objectifs stratégiques n’a pas été sérieusement analysé.

Pour une analyse critique du discours humanitaire

Le concept de déplacé ainsi que le régime de protection mis en place par les Nations unies sont apparus au cours des premiers conflits de l’après guerre froide. Mais, un examen même rapide de ces crises révèle le gouffre qui sépare les échanges diplomatiques et les réalités sur le terrain. Ce vide entre les discours et l’action est, bien sûr, l’objet de nombreuses analyses, débats, conférences et publications sur les migrations forcées. Pourtant, bien que les études sur l’insuffisance de l’action internationale envers les déplacés abondent, la plupart conduisent à rejeter le concept de protection internationale. Beaucoup d’experts voient dans l’action humanitaire un cache-misère masquant mal l’indifférence générale vis-à-vis des déplacés. D’autres, spécialistes en migration, ont dénoncé ces approches comme un emprisonnement cynique des victimes de conflits. Une analyse mesurée de la stratégie derrière ces politiques et de ses impacts reste encore à entreprendre.

Depuis près de quinze ans, des experts dénoncent le manque d’engagement des pays occidentaux envers les populations les plus vulnérables, minorités persécutées, déplacés, victimes de guerre, et autres. Le développement de l’action humanitaire des années 1990 est souvent opposée au manque d’initiative en matière de prévention des conflits, à la diminution des fonds destinés au développement ainsi qu’à la réticence des pays occidentaux à se lancer dans des opérations de désarmement [27]. Comme d’autres, Christopher Bennet et Martin Shaw dépeignent les gouvernements occidentaux comme indifférents aux souffrances des migrants, mais sensibles aux pressions de l’opinion publique [28]. Dans ce contexte, l’action humanitaire est décrite comme superficielle, de courte durée et dépendante de l’attention que les médias donnent aux crises. Aujourd’hui, beaucoup d’acteurs humanitaires sont eux-mêmes sceptiques sur la portée de leur travail. D’autres études insistent sur la complexité des situations et la confusion dans laquelle se prennent la plupart des décisions en matière d’action humanitaire [29]. L’absence de protection est alors attribuée à la multiplication des acteurs, ainsi qu’à des effets secondaires inattendus de l’intervention elle-même [30].

Beaucoup d’énergie a donc été dépensée ces dernières années pour améliorer la coordination des diverses organisations et leur transparence afin de mieux résoudre ces situations urgentes et complexes [31]. Les projets Sphere, Humanitarianism and War, Active Learning Network for Accountability and Performance in humanitarian action (ANALP) par exemple participent tous de cet effort louable pour accroître l’harmonisation des performances sur le terrain. Cependant, comme Fiona Terry le fait remarquer, l’accent dans la plupart de ces réformes est mis sur la dimension technique, non politique [32]. De plus, que l’on parle de vide décisionnel ou de la confusion des politiques, on ignore la franchise des acteurs politiques eux-mêmes. En 1991-1992, les chefs de gouvernement occidentaux ont publiquement expliqué qu’ils désiraient éviter des exodes de masse. Ils n’étaient pas indifférents aux victimes de guerre mais au contraire ils étaient ouvertement inquiets, très attentifs à leurs mouvements. Il est donc important que les acteurs humanitaires réalisent que certains de leurs problèmes ne résultent pas de la confusion générale ni de l’indifférence du monde. Au contraire, ces problèmes peuvent être liés au fait que leur travail humanitaire participe de la stratégie « protéger pour contenir ».

Une approche différente domine les débats entre spécialistes des migrations forcées. La plupart reconnaissent les conséquences humaines dramatiques de la fermeture des frontières occidentales. Ici, on insiste sur le fait que les déplacés font les frais de politiques d’intervention dont la finalité est le maintien de civils dans leurs pays en guerre [33]. Tout discours sur la protection est alors vu comme une cynique manipulation d’audiences trop crédibles. B.S. Chimni déclara que la création des zones de sécurité était l’équivalent d’un emprisonnement des victimes [34]. Pour Michael Barutciski, les victimes du nettoyage ethnique en Bosnie n’ont pas eu le « droit de rester » comme le prétendaient les diplomates, mais se sont vu imposer un « devoir de rester » [35]. « Burden sharing », le principe selon lequel les États partagent la charge représentée par les réfugiés, s’est transformé en « burden shifting », un ensemble de mesures par lesquelles les pays riches contiennent les réfugies dans les zones les plus pauvres et instables du monde [36]. De même, les abus du concept de « protection préventive » ont été explorés par Jack Mangala [37]. La protection préventive prévoit de porter secours aux civils menacés avant qu’ils ne soient contraints de prendre la fuite. Cependant ce concept a été déployé principalement pour des déplacés. Il s’agissait donc clairement d’empêcher non la fuite initiale mais le passage de la frontière.

Il est donc logique de remplacer le terme « personnes en danger » par celui de « frontières en danger » dans bien des échanges diplomatiques et de dénoncer l’hypocrisie occidentale. Pour autant, rejeter complètement l’idée de protection internationale ne se justifie pas. Bien que tentante, une telle attitude ne permettrait pas l’examen critique des synergies entre humanitaire et sécuritaire. Une bonne compréhension de ces liens ambigus est nécessaire avant toute réforme.

Concevoir le développement de la protection internationale pour les déplacés comme un outil de gestion des flux migratoires permet de mieux comprendre les différentes mesures prises sur le terrain. En particulier, cette perspective éclaire le fait que seules certaines crises provoquent une intervention. D’autre part, cette ingérence obéit à des constantes telles que la réticence à évacuer ou la priorité donnée aux rapatriements même en cours de conflit. Cette optique explique aussi pourquoi certaines options ne sont jamais proposées alors que d’autres ne sont jamais remises en question. La protection in situ en particulier reste perçue comme la meilleure réponse possible de la communauté internationale face au nettoyage ethnique. Il existe peu d’analyses des problèmes que cette approche a créés. En Bosnie, chaque fois que les agents du HCR ou du CICR évacuaient des personnes en danger, ils étaient accusés de complicité avec des forces paramilitaires responsables du nettoyage ethnique [38]. De même, l’accent mis en permanence sur le « retour volontaire » masque le fait que beaucoup de déplacés n’ont plus ni maison, ni même de village [39]. En fait, les discours humanitaires actuels forment un cadre conceptuel dans lequel certaines options politiques ne s’inscrivent pas alors que d’autres semblent aller de soi.

Le discours humanitaire dominant ne limite pas seulement les choix politiques face aux crises ; il définit aussi la manière dont est pensée l’action humanitaire. Considérons l’idée qu’une intervention humanitaire est une atteinte à la souveraineté territoriale d’un l’État : c’est pratiquement un axiome en relations internationales et la plupart des ouvrages traitant du sujet contiennent un débat sur le principe de la souveraineté nationale [40]. En 2001, le rapport de la Commission sur l’intervention et la souveraineté nationale réitéra l’argument que les États ont un devoir de protection de leurs populations civiles. Quand ils n’assument pas cette responsabilité, la commission estime que la communauté internationale, à travers les Nations unies, a un devoir d’ingérence de type « subsidiaire », pour employer une expression défendue par Mario Bettati [41]. Mais ce rapport, comme la plupart des écrits sur le sujet, ne discute pas de la possibilité d’interventions humanitaires conçues essentiellement pour protéger un pays frontalier de flux migratoires. Un tel point de vue devrait être pris en compte dans les débats sur la souveraineté et l’interventionnisme. De même, notre compréhension des espaces humanitaires doit être re-examinée. Des spécialistes aussi expérimentés que Larry Minear, Thomas Weiss, Oliver Ramsbotham et Tom Woodhouse tendent à affirmer que les interventions occidentales ne peuvent qu’élargir les zones humanitaires, et donc les possibilités offertes aux déplacés [42].

Mais les crises mentionnées dans cet article montrent des situations dans lesquelles les autorités intervenantes décident de réduire l’espace humanitaire. Ce fut le cas à Kibeho pour forcer des rapatriements mais aussi peut-être dans les zones de sécurité à l’est de la Bosnie (Srebrenica, Zepa, Gorazde) pour conclure un accord de paix. Une telle perspective ouvre de nouvelles voies pour examiner la responsabilité des Nations unies lors de déroutes humanitaires. Elle met aussi l’accent sur le fait que la présence de personnes déplacées est perçue comme un facteur de désordre international. La peur du chaos, de frontières submergées, d’États instables, incapables de contrôler les populations dont ils ont la charge, semble viscérale au sein des Nations unies. Par conséquent, étudier des zones frontalières en crise (par exemple Afghanistan/Pakistan, Rwanda/RDC ou Libéria/Côte d’Ivoire), examiner la liberté de mouvement des déplacés (Soudan, Iraq), ou encore suivre l’évolution des principes des Nations unies sur le terrain (Soudan, RDC, Gaza et Territoires occupés, etc.) sont certains des axes de recherche à explorer. Ils nous permettraient de mieux cerner cette relation pleine de non-dits entre peurs sécuritaires et action humanitaire.

Céciile DUBERNET
Docteur en science politique (Bristol University UK)
(Janvier 2006)

NOTES

[1] « Principes directeurs relatifs au déplacement de personnes à l’intérieur de leur propre pays », OCHA, 1998 ; voir aussi E/CN.4/1998/53/Add.2, 11 février 1998.

[2] Le travail de Francis Deng (depuis 1992, premier représentant des Nations unies pour les déplacés) et Roberta Cohen reste une référence sur ce sujet : R. COHEN et F. DENG (dir.) The Forsaken People, Case Studies of the Internally Displaced, et Masses in Flight, the Global Crisis of Internal Displacement, Washington D.C., The Brookings Institution, 1998. Pour des rapports précis et actualisés sur la situation des personnes déplacées, se référer au site du Global IDP Project : www.idpproject.org .

[3] « Internal Displacement : Global overview of trends and developments in 2004 », Rapport du Global IDP Project : www.idpproject.org/global_ov...

[4] G. CHALIAND, The Kurdish Tragedy, Londres, Zed Books Ltd, 1994, p. 70.

[5] J. NYE et R. SMITH (dir.), After the Storm : Lessons from the Gulf War, Lanham, The Aspen Institute, 1992, p. 344.

[6] N. MALCOLM, Bosnia : A Short History, Londres, Papumac, 2e éd., 1996, p. 242.

[7] Résolution du Conseil de Sécurité : UNSC S/RES/912 (1994), 21 avril 1994.

[8] R. COHEN et D. KORN, « Failing the Internally Displaced », Forced Migration Review, vol. 5, 1999, p. 12.

[9] « A Comprehensive Response to the Humanitarian Crisis in the former Yugoslavia », Rapport du HCR (HCR/IMYF/1992/2, 24 juillet 1992) ; voir aussi « À l’initiative du HCR, cent soixante dix pays au chevet des réfugiés de l’ex-Yougoslavie », Le Monde, 29 juillet 1992, p. 3.

[10] « The United Nations and the situation in Rwanda », Rapport du Département des Nations Unies pour l’information Publique (UNDPI) , New York, avril 1995, p. 9.

[11] Ce point a été exploré in C. DUBERNET, The International Containment of Displaced Persons, Aldershot, Ashgate, 2001, p. 57-77.

[12] UK Foreign and Commonwealth Office, Press office, 8 avril 1991, cité dans M. WELLER, Iraq and Kuwait, the Hostilities and their aftermath, Cambridge International Document Series, vol. 3, Cambridge, Grotius Publication Limited, 1993, p. 715 ; voir aussi les commentaires de Jacques Santer in « Au conseil européen de Luxembourg les douze se mobilisent en faveur des kurdes irakiens », Le Monde, 10 avril 1991, p. 4.

[13] Déclaration au nom de l’Union Européenne à la conférence International meeting on humanitarian aid for victims of the conflict on the former Yugoslavia, Genève, 29 juillet 1992.

[14] « La situation en Bosnie-Herzégovine ; faute d’asile en Occident, la libération de cinq mille détenus des camps a été repoussée au 3 novembre », Le Monde, 26 octobre 1992, p. 3 et « Le CICR appelle à la création de ’zones protégées’ », Le Monde, 3 novembre 1992, p. 3.

[15] Cité dans DUBERNET, op. cit., note 11, p. 67.

[16] « The United Nations and the Situation in Rwanda », op. cit., note 10, p. 10.

[17] « Surmontant les réticences américaines, le Conseil de sécurité de l’ONU préconise le déployment de 5 500 ’casques bleus’ au Rwanda », Le Monde, 18 mai 1994, p. 4.

[18] Voir à ce sujet le travail remarquable de Françoise Boucher-Saulnier et par example sa contribution dans M.-J. DOMESTICI-MET (dir.), Aide Humanitaire internationale, un consensus conflictuel, Paris, Economica, 1996, p. 196-208, ou plus récemment son Dictionnaire pratique du droit humanitaire, Paris, La Découverte, 2000.

[19] N. BOTH et J.W. HONIG, Srebrenica, Record of a War Crime, Londres, Penguin Book, 1996, p. 115.

[20] F. TERRY, Condemned to Repeat ? The Paradox of Humanitarian Action, New York, Cornell University Press, 2002, p. 155-215.

[21] R. OFTERINGER et R. BAKER, « A Republic of Statelessness : Three Years of Humanitarian Intervention in Iraqi Kurdistan », Middle East Report, vol. 24, n° 2-3, 1994, p. 44 ; aussi M. GUNTHER, « A Kurdish State in Northern Iraq ? », Humboldt Journal of Social Relations, vol. 20, n° 2, 1994, p. 48.

[22] TERRY, op. cit., note 20, p. 211.

[23] Voir l’analyse faite par le directeur des opérations de retour coordonnées par les Nations unies : R. KENT, « The Integrated Operations Centre in Rwanda : Coping with Complexity », in J. WHITMAN et D. POCOCK (dir.), After Rwanda, The Coordination of UN Humanitarian Assistance, Londres, Macmillan, 1996, p. 63-85.

[24] United Nations Inter-Agency Programme for Iraq, Kuwait and the Iraq/Turkey and Iraq/Iran border areas, Updated and consolidated appeal for urgent humanitarian action, 15 mai 1991 ; voir l’introduction par S. AGA KHAN cité dans DUBERNET, op. cit., note 11, p. 99.

[25] United States Agency for International Development (USAID), Rwanda reports, 5-8 août 1994, p. 7-13 et 16-18 août 1994, p. 6-8.

[26] Ces principes peuvent être consultés sur le site www.idpproject.org .

[27] Par exemple voir A. ROBERTS, « Humanitarian Action in War », Adelphi Papers, n° 305, 1997, p. 9, ou encore BOUCHER-SAULNIER,, Dictionnaire Pratique.., op. cit., note 18, p. 12.

[28] C. BENNET, Yugoslavia’s bloody Collapse : Causes, Course and Consequences. Londres, Hurst and Compagny, 1995, p. 3. M. SHAW, Civil Society and Media in Global Crises, Representing Distant Violence, Londres, Pinter, 1996, p. 88.

[29] Sur ce thème, le travail de L. MINEAR est une référence, entre autres The Humanitarian Enterprise, Dilemmas and Discoveries, Bloomfield, Kumarian Press Inc., 2002, p. 171.

[30] TERRY, op. cit., note 20, p. 2 ; KENT, op. cit., note 23, p. 77.

[31] Voir P. AALL, « What Do NGOs Bring to Peace-Making ? », in C. CROCKER, F.O. HAMPSON et P. AALL (dir.), Turbulent Peace : the Challenges of Managing International Conflict, Washington D.C., United States Institute of Peace Press, 2003, p. 369.

[32] Op. cit., note 20, p. 52.

[33] H. ADELMAN, « The Ethics of Humanitarian Intervention : The Case of the Kurdish Refugees », dans le Public Affairs Quarterly, vol. 2, n° 9, 1992, p. 74. C. TISO, « Safe Haven Refugee Programs : A Method of Combatting International Refugee Crises », Georgetown Immigration Law Journal, vol. 4, n° 8, 1994, p. 575.

[34] « The Incarceration of the Victims : Deconstructing Safety Zones » in N. AL-NAUIMI et R. MEESE (dir.), International Legal Issues Arising under the United Nation Decade of International Law, Proceedings of the Qatar International Law Conference. La Haye, Martinus Nijhoff Publishers, 1995, p. 823.

[35] « The Reinforcement of Non-admission Policies and the Subversion of UNHCR : Displacement and Internal Assistance in Bosnia-Herzegovina (1992-1994) », International Journal of Refugee Law, n° 1-2, vol. 8, 1996, p. 95.

[36] B.S. CHIMNI (dir.), International Refugee Law. A Reader, New Dheli, Sage Publication, 2000, p. 151.

[37] « Prévention des déplacements forcés de population -possibilités et limites », International Review of the Red Cross, n° 844, 2001, p. 1083.

[38] M. MERCIER, Crimes Without Punishment, Londres, Pluto Press, 1995, p. 6.

[39] G. HOVEY, « Discontent with Assistance to the Bosnian Return Process », Forced Migration Review, vol. 11, 2001, p. 22 ; C. PHUONG, « At the Heart of the Return Process : Solving Property Issues in Bosnia and Herzegovina », Forced Migration Review, vol. 7, 2000, p. 7 ; DUBERNET, op. cit., note 11, p. 100.

[40] Voir par example MINEAR, op. cit., note 29, p. 93 ou S. HOFFMANN, in CROCKER et al., op. cit., note 31, p. 276.

[41] INTERNATIONAL COMMISSION ON INTERVENTION AND STATE SOVEREIGNTY, The Responsibility to Protect. Ottawa, International Development Research Centre, 2001, p. 31. M. BETTATI, « L’ingérence au nom de la subsidiarité », in DOMESTICI-MET, op. cit., note 18, p. 257-275.

[42] O. RAMSBOTHAM et T. WOODHOUSE, Humanitarian Intervention in Contemporary Conflict : A Reconceptualisation, Cambridge, Polity Press, 1996, p. 191. L. MINEAR et T. WEISS, Mercy under Fire, War and the Global Humanitarian Community, Boulder, Westview Press, 1995, p. 38.