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Le drame ignoré des Palestiniens d’Irak et l’exode vers la Syrie

Silvia Rossi

citation

Silvia Rossi, "Le drame ignoré des Palestiniens d’Irak et l’exode vers la Syrie ", REVUE Asylon(s), N°5, septembre 2008

ISBN : 979-10-95908-09-8 9791095908098, Palestiniens en / hors camps., url de référence: http://www.reseau-terra.eu/article808.html

résumé

Suite à la chute du régime de Saddam Hussein, la petite communauté des Palestiniens résidents en Irak devint l’objet d’une véritable campagne de persécution. Le discours officiel, véhiculé par la propagande gouvernementale, la présentait comme favorisée par le régime. À la chute de l’ancien régime, ces soi-disant privilèges dont auraient été lotis les Palestiniens - soupçonnés bien souvent d’avoir été des sympathisants de l’ancien dictateur - ont été le prétexte d’une montée de violence à leur encontre, transformant leur existence tranquille en un véritable cauchemar

Mots clefs

Suite à la chute du régime de Saddam Hussein, la petite communauté des Palestiniens résidents en Irak [1] devint l’objet d’une véritable campagne de persécution. Cette communauté était essentiellement concentrée dans la capitale où l’UNRWA (United Nations Relief and Work Agency for Palestine Refugees) recensait, en 2003, environ 23 000 personnes [2]. Le discours officiel, véhiculé par la propagande gouvernementale, la présentait comme favorisée par le régime. Toutefois, les Palestiniens, à l’instar de tout non-irakien résidant en Irak, ont vu leurs prérogatives menacées par des mesures telles que le décret 23 édicté en 1994, auquel Saddam Hussein a, lui-même, explicitement associé les Palestiniens [3]. Ce texte révoque le droit à la propriété et à toute forme d’investissement de tout résident non-irakien et oblige à recourir à un prête-nom pour acheter une voiture ou même, ouvrir une ligne téléphonique. À la chute de l’ancien régime, ces soi-disant privilèges dont auraient été lotis les Palestiniens - soupçonnés bien souvent d’avoir été des sympathisants de l’ancien dictateur - ont été le prétexte d’une montée de violence à leur encontre, transformant leur existence tranquille en un véritable cauchemar [4]. La campagne de diffamation dont ils font désormais l’objet consiste à les décrire comme des "terroristes" et à les exposer, à ce titre, à des arrestations et des détentions arbitraires. Ils assistent aussi à des irruptions impromptues à leur domicile, suivies de perquisitions aussi soudaines que brusques par les forces de sécurité et les forces d’occupation irakiennes et américaines [5].

Parallèlement, les Palestiniens sont également devenus la cible de milices pas toujours identifiées [6]. Certaines agissent dans l’ombre des forces de sécurité irakiennes, d’autres, au contraire, agissent de manière autonome. Ce climat de peur est également engendré par tout un cortège d’intimidations, des avertissements, des lettres de menace ou de chantage apposées sur les portes des maisons et même d’enlèvements. A plusieurs reprises des personnes ont été séquestrées ou tuées pour la seule raison d’avoir en leur possession des papiers d’identité palestiniens. Les cadavres portaient souvent des traces d’atroces sévices corporels (cf. le rapport du Haut Commissariat aux Réfugiés des Nations Unies [unhcr] sur le site : http://www.unhcr.org/news/ ainsi que les chroniques régulièrement mises à jour et accessibles sur : http://palestiniansiniraq.blogspot.com).

Nahla, 36 ans, est arrivée récemment à Damas où elle a rejoint sa sœur qui y vit depuis 2 ans. Elle raconte en pleurant : « on ne sort jamais plus de la maison, c’est devenu trop dangereux. Notre cousine de 37 ans a été criblée de balles par des hommes armés aux visages couverts qui ont barré la rue et l’ont sommée de descendre de sa voiture. Le fils de notre voisine, âgé de 27 ans, a été tué dans la rue comme ça, de sang froid, après qu’il ait été identifié comme palestinien. Que dieu nous aide… ».

Selon une déclaration émise par plusieurs organisations palestiniennes qui travaillent dans le domaine des droit de l’homme et du droit au retour, et publiée dans les actes de la conférence tenue le 5 mars 2007 à l’université de Damas, sous le thème « Les réfugiés palestiniens en Irak : la protection perdue », il s’avère que le nombre des Palestiniens assassinés en Irak après la chute du régime de Saddam Hussein, a atteint les 186 personnes. Cependant, selon la déclaration du Haut Commissaire aux réfugiés Antonio Guterres à la conférence internationale qui s’est tenue à Genève en avril dernier, autour de la question de la crise humanitaire qui touche la population irakienne, le nombre de victimes palestiniennes de ce conflit s’élèverait à « plus de 600 » personnes. [7]

En ce qui concerne les déplacés, nous ne disposons pas de chiffres officiels. Selon une source qui préfère rester anonyme, il s’agirait d’un chiffre compris entre 100 et 200 familles, contraintes d’abandonner leurs maisons en raison de la pression engendrée par quelques milices, surtout « dans les quartiers à majorité chiite ou contrôlés par des chiites ». [8] De plus, selon la déclaration d’un fonctionnaire de l’UNRWA à Damas, quelques centaines de Palestiniens ont été chassés de leurs maisons par les propriétaires, dans un climat généralisé d’hostilité à leur encontre. [9]

Les témoignages recueillis par Sheila Provencher, une militante canadienne de Christian Peacemaker Teams [10] (CPT) qui a accompagné le 1er groupe de Palestiniens fuyant la guerre irakienne pour se réfugier en Syrie durant l’automne 2005, décrivent l’horreur de la situation. Ainsi, le meilleur ami d’un Palestinien du groupe, Mūsa « a été détenu par des forces irakiennes et, à la fin, son cadavre a été retrouvé présentant des traces de brûlures, certaines faites à la perceuse et d’autres dues aux tortures à l’électricité ». Bushra, une autre membre du groupe et mère de quatre enfants âgés de 2, 9, 13 et 14 ans, raconte qu’ « une fois, à 3 heures du matin, des soldats irakiens ont fait irruption dans notre maison. Ils ont empoigné mon mari à moitié nu jusque dans la rue et ont pointé un pistolet sur la tête de ma fille. Ceci s’est passé au moins 3 ou 4 fois ».

Toute la population civile en Irak, sans distinction, souffre désormais des terribles conséquences d’un pays précipité dans le chaos de la guerre civile. Des dizaines de civils sont la cible de violences quotidiennes interconfessionnelles perpétrées par des milices ou des groupes armés de différentes affiliations politiques. Des centaines de milliers de civils ont été expulsés de leur maison ou contraints de fuir l’Irak. La population des déplacés au sein de l’Irak, s’élève aujourd’hui à 2 millions de personnes. Il y a 1 400 000 réfugiés en Syrie, et plus de 750 000 en Jordanie. [11] Toutefois, trois motifs rendent la communauté palestinienne résidente en Irak particulièrement vulnérable en comparaison au reste de la population irakienne : l’ambiguïté de son statut juridique, le comportement désormais hostile des autorités irakiennes envers elle, et enfin le fait que les possibilités de fuir leur sont restreintes, les routes de l’exil leur étant quasiment fermées.

Contrairement aux communautés, numériquement bien plus importantes, de Palestiniens résidents en Jordanie, au Liban et en Syrie, les Palestiniens d’Irak n’ont pas bénéficié des services de l’UNRWA, l’Agence des Nations Unies mandatée auprès des réfugiés palestiniens. [12] En absence de tout référent international, l’introduction par les autorités irakiennes de nouvelles procédures réglementant leur présence, a eu de très graves conséquences sur la sécurité et la liberté des civils palestiniens, et les a privés de toute protection. Ces mesures consistent la suppression des titres de résidence permanente et l’obligation de les renouveler régulièrement, ainsi qu’en la suspension de l’émission de titres d’identité ou de voyage. [13] Alors que les Irakiens ont encore la possibilité de fuir le pays, la liberté de circulation des Palestiniens est d’autant plus réduite que toutes les frontières sont irrémédiablement fermées à toute personne détenant un document de voyage palestinien émis en Irak.

Seules, la Syrie et la Jordanie ont, dans un 1er temps, accueilli un nombre limité de Palestiniens venant d’Irak. Le 1er groupe de 18 Palestiniens, évoqué précédemment - dont la demande d’asile a été acceptée par le Canada pour 15 d’entre eux - a d’abord été accueilli en Syrie à la fin de l’année 2005. [14] En 2006, un autre groupe de 287 Palestiniens [15] qui ont tenté en vain d’entrer en Jordanie ont finalement été accueillis en Syrie et installés dans le camp de réfugiés d’al-Hol au nord du pays. Ce camp avait été utilisé pour accueillir la population irakienne ayant fui la 1 ère guerre du Golfe. Bien que le camp soit placé sous la juridiction du HCR, qui a accordé à ces réfugiés le statut de « personnes protégées », leurs conditions de vie restent très précaires, et ils n’ont ni l’autorisation de travailler ni la liberté de mouvement.

Depuis leur arrivée, la Syrie a fermé ses frontières aux Palestiniens provenant d’Irak, à l’instar de tous les pays frontaliers. Un certain nombre de réfugiés a cependant réussi à entrer dans le pays ; certains dotés de passeports de l’Autorité palestinienne, d’autres avec des papiers irakiens falsifiés. Ces derniers ne bénéficient pas de statut légal, néanmoins leur présence est tolérée par les autorités syriennes. Au total 700 familles environ sont concernées [16]. Elles résident actuellement dans le quartier du Yarmūk à Damas, essentiellement habité par des Palestiniens.

Les réfugiés possédant un document de voyage palestinien expiré se sont regroupés à la frontière syro-irakienne. Une partie a été accueillie par les autorités syriennes et regroupée dans le camp de Tanāf, tandis que le reste se trouve dans le camp d’al-Walid, également à la frontière, mais en territoire irakien.

A Tanaf, au milieu du désert infesté de scorpions où grâce aux tentes fournies par le HCR, a été improvisé un camp de réfugiés, depuis un an se trouvent environ 352 réfugiés palestiniens. [17] Des organisations comme le Comité International de la Croix Rouge (CICR), le Croissant Rouge Palestinien et Syrien, l’UNHCR et l’UNRWA, soutiennent un réseau d’associations palestiniennes [18] et leur fournissent des biens de première nécessité. Les conditions de vie dans le camp sont très dures, notamment pendant l’été où la chaleur atteint des températures insupportables et pendant l’hiver, rigoureux dans cette région. De plus, les forces de la Garde Nationale Irakienne, y ont fait irruption menaçant les habitants et, une fois, ont arrêté 3 hommes et 2 jeunes garçons.

Au début de l’année, le HCR en collaboration avec l’hôpital Palestine du camp du Yarmūk a installé un petit dispensaire médical permanent. Chaque semaine, à tour de rôle, un médecin officie au camp de Tanaf, tandis qu’une ambulance transporte les cas les plus graves vers Damas. Les seuls hôpitaux de la capitale où les réfugiés de Tanaf sont autorisés à recevoir des soins sont l’hôpital Palestine situé dans le quartier du Yarmūk- évoqué plus haut- et l’hôpital de Douma- qui traite essentiellement les urgences. [19]

Pour les habitants du camp en âge de scolarisation, l’UNRWA a sélectionné et formé un groupe d’enseignants parmi les habitants de Tanaf. Ce service, conçu pour faire face au problème dû à la longue interruption de la scolarisation de nombreux enfants, a été mis en place dès le début de l’année.

La situation est encore plus désespérée pour les Palestiniens du camp de réfugiés d’al-Walid. De décembre 2006 jusqu’à présent le nombre des réfugiés dans le camp – qui augmente sans cesse – est passée de 122 à 1071 personnes. [20] En raison des difficultés d’acheminement de l’aide humanitaire dans cette zone, les réfugiés ont compté au début sur la générosité d’un chef de tribu local. Au début de l’année a été mis en place un projet de restructuration et d’élargissement du camp, financé par l’UNHCR, l’UNICEF et ICS, une organisation non gouvernementale italienne. Un vieux bâtiment proche du camp sera affecté a l’école et au centre médical. La fin des travaux est prévue pour juillet 2007, et on estime qu’a cette date le camp pourra accueillir 3000 réfugiés. [21]

Pour ces réfugiés, il n’y a pas des perspectives d’avenir. Nous avons rencontré Iyad qui est réfugié depuis le mois de mai 2006 dans le camp de Tanaf, lors d’une de ses fréquentes visites à l’hôpital falastîn du Yarmūk. Il est autorisé à s’y rendre pour recevoir des soins médicaux. Il déclare : « Je suis né en Palestine en 1947 et après la Nakba je suis arrivé comme réfugié à Bagdad, où j’ai vécu toute ma vie. Maintenant, âgé de 60 ans, je me retrouve à nouveau réfugié au milieu du désert, dans un no man’s land qui est de toutes façons préférable aux dangers auxquels nous étions exposés quotidiennement lorsque nous étions en Irak. Désormais, je n’espère plus rien pour moi mais que va-t-il arriver à mes fils ? ».

Jamal, 49 ans, palestinien né à Bagdad et arrivé depuis quelques mois à Damas avec sa famille, constate que « aujourd’hui c’est pire qu’en 1948. Au moins, à ce moment là, la tragédie de la Nakba avait suscité la solidarité de tous les pays arabes et pour les réfugiés, toutes les portes étaient ouvertes… ».

La Syrie qui accueille déjà plus de 400 000 réfugiés palestiniens [22] sur son territoire, a adopté depuis longtemps une attitude très ferme à propos des nouveaux afflux de réfugiés palestiniens dans le pays. Considérant aussi la dimension politique que revêt le problème de réfugiés palestiniens dans le cadre du conflit israélo-arabe, l’urgence humanitaire représentée par l’exode des Palestiniens d’Irak ne devrait pas être laissée à la charge des seuls pays comme la Syrie et la Jordanie. Elle devrait raisonnablement devenir l’objet d’une action commune entre les Nations arabes et la communauté internationale sans exclure Israël. L’État hébreu a cependant refusé les appels de l’Autorité palestinienne. Ces demandes, soutenues aussi par le Haut Commissaire auprès des Nations Unies, visaient à obtenir l’autorisation pour les Palestiniens qui fuient l’Irak d’être provisoirement accueillis dans les Territoires occupés.

La ligne adoptée par le gouvernement syrien a suscité des réactions contrastées de la part de la classe politique palestinienne. Un jeune représentant du FPLP (Front Populaire de Libération de la Palestine) de Yarmouk affirme que « si la Syrie ouvrait ses frontières aux Palestiniens qui fuient d’Irak, cela créerait un précédent qui pourrait encourager d’autres pays arabes à expulser les palestiniens présents sur leurs territoires, comme ce fut le cas dans le temps en Libye. ». [23] Salah Salah, ex-numéro deux du FPLP au Liban, est d’une toute autre opinion : « La Syrie devrait concéder un permis de séjour temporaire aux réfugiés palestiniens. Au fond, il ne s’agit que de quelques milliers de réfugiés. Mais les autorités syriennes se sont prononcées contre une solution de ce type, à moins qu’il n’y ait une décision de la Ligue Arabe. Ici je me demande : pourquoi n’y a-t-il pas eu besoin d’une décision de la Ligue Arabe pour accueillir plus d’un million de réfugiés irakiens ? ». [24]

Il est urgent de trouver une solution pour les réfugiés palestiniens qui continuent à s’amasser à la frontière syrienne et jordanienne sans pouvoir entrer. Il apparaît crucial de garantir parallèlement une protection aux civils palestiniens restés en Irak, les autorités irakiennes et les forces d’occupation américaines ont jusqu’à présent échoué [25] et ce phénomène d’insécurité est appelé à s’amplifier. Jusqu’à présent, les requêtes adressées de toute part au président irakien Jalal Talabani, de transférer au moins temporairement les Palestiniens dans des zones plus sûres à l’intérieur de l’Irak, comme le Kurdistan, sont restées lettres mortes. [26]

D’autres solutions ont été proposées, comme la possibilité annoncée par le Yémen d’accueillir, à titre temporaire, les Palestiniens qui n’ont pas réussi à quitter l’Irak. Mais même cette proposition n’a jusqu’à présent débouché sur rien de concret.

Silvia Rossi, Damas, le 24-06-07 / 25-04-07

NOTES

[1] L’essentiel de la communauté palestinienne arriva en Irak à la suite de la Nakba, terme arabe qui signifie « catastrophe » et désigne la défaite arabe de 1948 face à Israël. Ce groupe était constitué de 5 000 personnes environ, la plupart originaire des alentours de Haifa, plus précisément de trois villages situés sur le versant occidental du Mont Carmel : Ikram, Jaba’a e ‘Ain Ghazal. Le reste arriva en Irak par vagues successives et numériquement inférieures, notamment en 1967 et en 1991, suite à l’expulsion d’un grand nombre de Palestiniens du Kuwait pendant la première guerre du Golfe.

[2] L’Irak ne fait pas partie de l’aire d’opération de l’UNRWA, l’agence onusienne dépêchée auprès des réfugiés palestiniens. Arrivée pour la première fois en Irak suite après la chute de Bagdad en 2003, l’UNRWA fut chargée du recensement de la population palestinienne. De juillet à septembre 2003, furent enregistrés, à Bagdad uniquement, 23.000 personnes (parmi lesquelles, 18.000 avaient une pièce d’identité et un titre de voyage émis par les autorités irakiennes). La récolte des données ne fut jamais menée à terme ni dans la ville de Bosra, ni dans la ville de Mossoul car l’ensemble du personnel de l’ONU fut évacué d’urgence suite à l’attentat survenu au siège des Nations Unies en septembre 2003. Selon le UNHCR- Le Haut Commissariat aux Réfugiés, la communauté palestinienne résidant en Irak avant la chute du gouvernement de Saddam Hussein, comptait 34 000 personnes. Un journaliste palestinien né à Bagdad mais résidant actuellement en Syrie, a mené des recherches approfondies sur le sujet, et estime cette communauté à 25 000 personnes.

[3] Le décret n°23 a été promulgué le 7 mars 1994 et signé par le président du Conseil Supérieur de la Révolution (ra’is majlis qiyada ath-thaura) Saddam Hussein.

[4] Selon les témoignages recueillis, il résulte que les Palestiniens en Irak jouissaient d’un certain niveau de protection et, qu’en général, ils ne faisaient pas l’objet d’actes de discrimination. Il leur fut garanti l’accès gratuit à l’éducation, à la santé, le droit au travail et aux postes de l’administration publique. A partir de la fin des années 50 ils ont pu bénéficier de logements publics mis à leur disposition par le gouvernement irakien, les tajammu’at (Les principaux tajammu’at de Bagdad sont : Baladiyyat, le plus important, Bagdad Jadida, Tal Muhammad, Salam, Hurriyya et Dora. Les trois premiers sont situés à Bagdad Est, à majorité chiite, les autres sont dans le secteur ouest de la capitale, dont les habitants sont en majorité sunnites). Même s’ils ne peuvent être comparés aux camps de réfugiés, ces logements offrent généralement des conditions précaires, notamment en raison de la sur-densité.

[5] A propos de la fréquence et des modalités de ces inspections qui sont souvent réalisées en pleine nuit, Fatima, une jeune femme palestinienne, réfugiée à Damas après avoir fui l’Irak il y a 8 mois, témoigne : « Nous, les femmes, avons pris l’habitude de dormir vêtues. Quand les soldats arrivent la nuit, à l’improviste, pour inspecter les maisons cherchant des armes et des « terroristes », ils font irruption sans même nous donner le temps de nous habiller et mettre le voile. ».

[6] Les Palestiniens sont devenus la cible de menaces et d’agressions criminelles de la part des Forces du Badr (quaat al-badr), de la Brigade du Loup (liua’ al-dhe’ib) et de la Brigade du Scorpion (liua’ al- ‘aqrab), qui sont des milices dont les liens avec le Ministère de l’Intérieur sont bien connus. En outre, ils subissent des actes d’intimidation de la part de l’Armée du Mahdi, milice du leader shiite Muqtada al-Sadr, et d’autres groupes qui ne sont pas clairement identifiés, comme la Brigade du Jugement Dernier (liua’ ium al-qiama). Ces derniers avaient envoyé en mars 2006 plus d’une centaine de lettres menaçant de mort les familles palestiniennes du quartier al-Hurriyya à Baghdad. Cet épisode a amené le porte parole du HCR à exprimer sa vive préoccupation par rapport aux conditions de sécurité de la communauté palestinienne résidant en Irak.

[7] La source mentionnée dans la note n° 2 confirme la première estimation et considère les chiffres donnés par l’UNRWA comme « exagérés ». D’après son évaluation, le nombre des victimes palestiniennes, mis à jour jusqu’en mai 2007, se situerait entre 200 et 225 personnes. Cette source affirme que la plupart des Palestiniens seraient morts dans des actions commises par des milices, surtout après l’attentat du mausolée chiite des deux imams militaires de Samarra, en février 2006, qui a déclenché l’explosion de la violence confessionnelle avec l’incontrôlable détérioration de la situation sécuritaire.

[8] Ce qui mènerait à penser que la composante confessionnelle n’est pas étrangère aux persécutions dont les Palestiniens – en grande majorité sunnites - sont devenus l’objet.

[9] Rapport présenté par le conseiller juridique auprès du Département pour la Défense des Réfugiés de l’UNHCR à Damas, au cours de la conférence déjà mentionnée intitulée « Les réfugiés Palestiniennes en Irak : la protection perdue », organisée par le collectif ‘A’idun.

[10] Le cpt est un groupe d’activistes et défenseurs des droits de l’Homme, basé aux États Unis et au Canada qui opère dans les zones en guerre. Le cpt était présent en Irak jusqu’à l’assassinat d’un de ses membres, Tom Fox, au printemps de l’année passée.

[11] Source : UNHCR, juin 2007. Toujours selon le Haut Commissariat aux Réfugiés des Nations Unies, la Syrie reçoit un minimum de 30 000 réfugiés irakiens par mois.

[12] Insérer ici la définition données par l’UNRWA (en citant la résolution de l’AGNU) du réfugié palestinien et montrer que ils ne sont pas considérés comme réfugiés palestiniens et aussi que le HCR est assez réticent à les prendre en charge ???

[13] Après la chute du régime de Saddam Hussein, la responsabilité de la communauté palestinienne résidant en Irak a été transférée du Département des Affaires Palestiniennes auprès du Ministère du Travail et des Affaires Sociales au Ministère des émigrés. Ce changement a rendu le statut juridique des Palestiniens qui habitent en Irak – dont le noyau est composé par des réfugiés de 1948 et leurs descendants - équivalent à celui des résidents étrangers, ce qui s’est traduit par la révocation du permis de séjour permanent dont ils jouissaient jusqu’alors. Les dispositions touchant le délai de renouvellement ont connu nombreuses variations. En octobre 2003 les Palestiniens furent concernés par un décret du Ministère de l’Intérieur prévoyant un renouvellement mensuel du permis de séjour pour tous les non-Irakiens. Par la suite, une prorogation de six mois fut approuvée, mais le gouvernement Al-Jaafari revint sur cette mesure pour finalement établir le renouvellement trimestriel. D’après les témoignages recueillis parmi les réfugiés palestiniens arrivés en Syrie de l’Irak il ressort qu’à partir des incidents de Samarra, en février 2006, les Palestiniens ont, dans la plupart des cas, cessé de demander le renouvellement de leurs permis. « Le trajet de la maison au bureau des renouvellements est devenu trop dangereux, les gens préfèrent ne pas prendre le risque » raconte Ahmad, 46 ans, qui a quitté l’Irak pour la Syrie il y a presque un an. En ce qui concerne les documents de voyage – qui équivalent au passeport pour les Palestiniens qui vivent dans les pays dont ils n’ont pas obtenu la nationalité - de mars 2003 à juin 2006, les autorités irakiennes en ont suspendu l’émission. La décision a été ensuite annulée en juillet 2006, mais les nouvelles dispositions pour l’obtention ou le renouvellement d’un document de voyage prévoient une procédure bureaucratique extrêmement longue et complexe. « Après m’être procuré la liste de trois pages des documents et certificats à fournir pour renouveler le document de voyage, on m’a signalé sans davantage d’explications que ma demande avait déjà été refusée. Finalement je suis arrivé en Syrie avec un passeport irakien falsifié. Je n’avais pas d’autre choix… » raconte avec amertume l’un des interviewés rencontrés à Damas.

[14] Ces réfugiés, qui au regard des autorités canadiennes sont considérés « privately sponsored », ont été accueillis au Canada grâce à la médiation du CPT.

[15] Source : UNHCR.

[16] Selon un Palestinien qui a vécu de nombreuses années entre l’Irak et la Syrie mais qui préfère taire son identité.

[17] Source : UNHCR.

[18] Ces associations, affiliées à des organisations politiques palestiniennes présentes en Syrie et notamment dans le camp du Yarmūk, se sont constituées en Comité de Thabir. En font partie le Comité de Thabat, l’Association des Fils des Martyrs, le Centre de la Jeunesse de Jafra et le groupe de Bader.

[19] Informations récoltées auprès du personnel médical et paramédical de l’hôpital Palestine de Yarmouk.

[20] Source : ICS (Consorzio Italiano di Solidarietà).

[21] Ibidem.

[22] Il faut considérer que les chiffres donnés par l’UNRWA concernant la population palestinienne posent un sérieux problème d’inexactitude. Non seulement ils ne prennent en compte que les palestiniens enregistrés auprès de l’agence onusienne mais en plus sont toujours enregistrés dans ces registres les réfugiés qui ont émigré vers un pays tiers et qui en ont peut-être acquis la nationalité (cf. Youssef Courbage, 2002, « la démographie des Palestiniens : l’invraisemblable légèreté des chiffres » in F. Mardam-Bey et E. Sanbar (dir.) Le Droit au Retour, le problème des réfugiés palestiniens, Sinbad-Actes Sud, Arles, pp. 177-206). Il semblerait que le nombre de Palestiniens en Syrie soit sensiblement inférieur aux chiffres avancés par l’UNRWA.

[23] Entretien, Janvier 2007.

[24] Entretien, 20 Juin 2007.

[25] La fatwa émise par le grand Ayatollah Al-Sistani le 30 avril 2006, qui interdit les attaques contre les Palestiniens, peut être considérée comme l’unique acte politique en faveur de la communauté palestinienne résidant en Irak de la part des autorités politiques et religieuses irakiennes. La fatwa d’Al-Sistani a amené une brève hudna (trêve), accompagnée d’une augmentation des forces de police dans les zones habitées majoritairement par des Palestiniens. A la suite de quoi les intimidations, les enlèvements et les assassinats de Palestiniens ont repris.

[26] Début 2006, le président palestinien Abu Mazen a envoyé en Irak deux délégations, l’une dirigée par Jibril Al-Rajjub, responsable de la sécurité préventive du temps de ‘Arafat, l’autre dirigée par As’ad Abd el-Rahman, membre du Comité Exécutif de l’OLP. La première délégation rencontra le président Talabani, la seconde fut reçue au Kurdistan par les représentants des principaux partis kurdes. Durant cette même période, une délégation formée par les représentants des factions de l’OLP en Irak pris contact avec le chef de la commission parlementaire des déplacés et immigrés, ‘Abd El-Khaleq ZanKana, du Parti Démocratique du Kurdistan, pour évaluer la disponibilité de Talabani et Barzani à prendre une décision en faveur d’un transfert temporaire de la communauté palestinienne résidant en Irak vers le Kurdistan.