Exils, entre Europe, Méditerranée et Afrique
"IMMIGRATION, TRANSIT ET RETENTION : Le Maghreb à l’épreuve des circulations transhariennes" (Dir. : Ali BENSAÂD). L’immigration est désormais un fait sociétal et spatial majeur au Maghreb. Majeur et inédit. Inédit pour un espace traditionnellement d’émigration. Inédit parce qu’il advient alors que cet espace continue à être un important émetteur de flux migratoires. Inédit enfin parce que l’immigration n’obéit pas aux mêmes processus à l’origine de son émergence dans certains pays de la rive Nord Méditerranéenne qui ont connu le passage de l’émigration à l’immigration. |
Immigration,
Transit et Rétention :
Le Maghreb à l’épreuve des circulations transsahariennes.
2, 3 et 4 novembre 2006, Marseille
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Lieu : salle de conférences de la bibliothèque régionale « Alcazar », Marseille, cours Belsunce
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Inscription automatique en ligne dans le formulaire qui se trouve en bas de cette page : http://www.reseau-terra.eu/article4...
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Contact : bensaadali@hotmail.com
COMITE D’ORGANISATION :
Ali BENSAÂD : bensaadali@hotmail.com
Mehdi ALLIOUA : mehdialioua@hotmail.com
Delphine PERRIN : perrindelphine@free.fr
Le colloque est organisé en partenariat avec le réseau
scientifique TERRA article423.html
COMITE SCIENTIFIQUE :
Michel AGIER (CEAf-EHESS, IRD Paris, TERRA)
Abdelkrim BELGUENDOUZE (Univ. Mohammed V-Rabat, TERRA)
Ali BENSAÂD (IREMAM Univ . de Provence)
Marc CÔTE (IREMAM Univ. de Provence)
Patrick GONIN (MIGRINTER Univ. de Poitiers)
Emmanuel MA MUNG (MIGRINTER Univ. de Poitiers)
Alain TARRIUS (CERS Univ. de Toulouse Le Mirail)
Jérôme VALLUY (Univ. Panthéon-Sorbonne,
CRPS, CEAf ,TERRA)
CALENDRIER :
Les résumés doivent parvenir avant le 05 septembre 2006
et être adressés par mail à l’adresse suivante :
Les communications retenues doivent parvenir avant le 05
octobre 2006 à la même adresse.
Appel à
communications
L’immigration est désormais un fait sociétal et spatial majeur au
Maghreb. Majeur et inédit. Inédit pour un espace traditionnellement
d’émigration, une émigration qui marque fortement ses structures démographiques
et socio-économiques. Mais inédit aussi parce qu’il advient alors que cet
espace continue à être un important émetteur de flux migratoires. Inédit enfin
parce que l’immigration n’obéit pas aux mêmes processus à l’origine de son
émergence dans certains pays de la rive Nord Méditerranéenne qui ont connu le
passage de l’émigration à l’immigration.
Au-delà de l’importance de la dimension quantitative de sa
présence, l’irruption puis l’affirmation de l’immigration modifie
substantiellement les perspectives des problématiques sociétales et spatiales
dans ces traditionnelles terres d’émigration et qui continuent à l’être. Elle
est une nouvelle donne qui interagit fortement avec l’espace et les sociétés du
Maghreb et contribue à en précipiter les évolutions.
Mais au delà des spécificités de cet espace, elle participe d’un
mouvement global de reconfiguration migratoire qui touche autant les profils
des migrants, leur catégorisation que les formes de la circulation, ses
contraintes, les destinations et les itinéraires devenus multidimensionnels et
qui propulsent le Maghreb sur leur trajectoire.
Si cette immigration a commencé par concerner les régions
sahariennes où elle continue à être fortement présente, aujourd’hui, elle se
diffuse jusqu’aux métropoles littorales du Nord du Maghreb dont elle alimente
les économies et marque les territorialités. Enfin, en se greffant sur une
circulation euromaghrébine qu’elle amplifie, elle se projette dorénavant, pour
une large part, sur l’Europe même si elle n’y aboutit pas souvent. Cette
nouvelle projection, en plus d’être un facteur de décuplement des flux, place
dorénavant le Maghreb au centre d’un dispositif relationnel qui, débordant le
cadre traditionnel euromaghrébin, prend une dimension intercontinentale et pose
la question des migrations vers et par le Maghreb comme un des enjeux des
relations internationales.
Aussi, en plus de stimuler des mutations sociétales et spatiales
dont il est nécessaire de mesurer les effets, elles constituent un outil
d’interrogation et d’analyse des mutations de l’espace maghrébin et des
modalités de son insertion dans le processus de mondialisation notamment sa
projection comme « cordon sanitaire » de l’Europe
Si, aujourd’hui, une part importante des flux migratoires finit
par être captée par l’Europe et se trouve être tendue vers elle, ceux-ci ne
sont pas tributaires de la seule attraction européenne.
La réactivation des circulations transsahariennes, aux lendemains
des indépendances, est d’abord le produit du développement et du rapprochement,
à travers le Sahara, entre rive maghrébine et rive sahélienne. Sous leurs
diverses formes, migrations de travail et commerce informel notamment, ces
circulations n’ont concerné, initialement, que le Sahara et notamment les
régions des pays pétroliers qui ont fonctionné comme un appel à l’échelle de
tout cet espace. Mais au-delà de celui-ci, ces flux tissent dorénavant leur
trame jusqu’aux métropoles littorales dont les espaces sont affectés autant
comme réceptacles d’une immigration dont la diffusion gagne de plus en plus le
Nord que par la fonction de relais comme portes Sud de l’Europe. Produits du
développement et de l’ouverture du Maghreb, à travers le Sahara, sur la rive
sahélienne, ces flux marquent dorénavant le nouvel ancrage méridien des
différents espaces nationaux maghrébins et l’affermissement de leur jonction
avec l’Afrique Noire. Cet ancrage méridien n’a cessé de s’affirmer depuis les
indépendances à mesure de leur développement et révèle la profondeur historique
et géostratégique africaines des pays du Maghreb. Celle-ci est bien illustrée
par les différentes routes transsahariennes concurrentes, l’importance des flux
d’échanges informels qu’elles portent ou l’explosion urbaine aboutissant à
l’émergence de places d’échanges et de transit qui, à l’image d’Agadez, Sebha
ou Tamanrasset constituent, démographiquement du moins, de véritables « Tour
de Babel » africaines. Mais les métropoles littorales, Alger, Oran, Rabat
ou Tripoli ont également leurs « quartiers africains ».
Un réseau relationnel dense et transnational déploie ainsi ses
trames du Sahel à
Par effets croisés d’une circulation de travail et commerçante
vers les régions sahariennes ou les métropoles du Nord, ceux d’un transit par
étape qui dure, ceux du durcissement de la politique européenne de répression
qui rabat les migrants sur le Maghreb et enfin ceux d’un « effet de
nasse » au Maghreb même, celui-ci se transforme, graduellement et de fait,
en espace d’immigration. Malgré le chômage endémique qui y sévit et les effets
déstabilisant des plans d’ajustement structurels, les migrants africains
investissent le marché de l’emploi. En dehors des régions sahariennes et de
certaines « niches » marginales comme la récupération, ils intègrent,
y compris au Nord, des secteurs comme le BTP, les services et la confection ou
plus spécifiquement la domesticité. Sur quels facteurs se fonde leur
intégration à ce marché notamment par rapport aux travailleurs locaux et quelle
forme prend- elle notamment en terme de traitement et de conditions de
travail ?
Si aucune disposition légale ne prend en compte la réalité de
l’installation de ces migrants, dans les faits, l’attitude des autorités,
oscillant entre tolérance et répression, est caractérisée par une ambiguïté qui
en garantit la précarité et la réversibilité. L’interférence européenne, en vue
de faire jouer au pays maghrébins un rôle de rétention, a eu, par contre, pour
effet de pousser les Etats maghrébins à durcir un dispositif répressif et des
mesures législatives qui ne compliquent pas seulement les tentatives de passage
en Europe mais perturbe les circulations, y compris celles, traditionnelles,
commerçantes et de travail. Déterminant pour une part essentielle les rapports
du Maghreb à l’Europe qui veut y externaliser la gestion de la question
migratoire, cette répression complique ses relations avec les autres pays
africains et au-delà des atteintes aux droits des migrants, rétrécit, pour les
sociétés locales, un espace démocratique déjà fortement limité. Quelle est la
réalité de l’impact sur l’Europe de flux migratoires qui y aboutissent
peu ? Comment s’expriment les enjeux de la question migratoire dans le
système relationnel du Maghreb ? Quelles formes a pu prendre cette répression
depuis les refoulements jusqu’aux camps de rétention en passant par les
nouvelles législations restreignant la circulation au Maghreb et quels ont pu
en être les effets sur les migrants mais également sur ses sociétés
locales ? En quoi cette question peut être un catalyseur des sociétés
civiles maghrébines ? En plus de poser un problème sociétal inédit,
l’immigration africaine survient dans des pays
caractérisés par un important déficit social et des sociétés locales
fragilisées. Comment, dans un tel contexte, ces dernières intègrent et traitent
la présence des migrants ? Quels points d’ancrage et de contact y trouvent
ces derniers et comment s’y adaptent-ils ? Si la xénophobie est une
réalité, un processus plus complexe de mise ne contact et de rapprochement se
réalise et qui participe d’un rapprochement et d’une intégration par « le
bas » entre deux aires géo-civilisationnelles
qui ont déjà sédimenté un passé commun fait d’intenses échanges. Comment les
sociétés maghrébines intègrent-elle cette altérité, nouvelle par rapport au
regard du Nord, miroir unique auquel s’est habituée à être formulée
l’interrogation sur soi ? Et comment ces migrations en réintroduisant le
cosmopolitisme par la « marge » reformulent la question du rapport à
l’autre en introduisant un autre « autre » : l’immigré dans des
terres d’émigration ?
Et, en somme, dans ce processus de « contraction » du
Monde mettant des « Sud » de plus en plus « profonds » en
confrontation inédite directe avec l’Europe et confrontant et rapprochant
d’abord ces « Sud » entre eux, quel destin pour le Maghreb ?